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Enquête : le PSG supporte le coût de son propre rachat
Comment Colony a acheté le PSG en 2006
vendredi, 27 mai 2011, par Vivien B.

Alors que se pose aujourd’hui la question d’un désengagement de Colony Capital, nous avons voulu en savoir plus sur les modalités de la cession du PSG par Canal+ au trio d’investisseurs franco-américain en 2006. À l’époque, la presse avait annoncé que la revente du club parisien s’était conclue pour 26 M€, mais sans rentrer dans les détails du montage réalisé. Pourquoi faire intervenir une nouvelle holding, alors qu’il en existait déjà une ? Qui supporte les coûts liés au remboursement de Canal+ ? Enquête.

Après avoir fait la lumière sur l’organigramme des entreprises du « groupe PSG » — et révélé que Colony Capital ne détient pas 95,8 % du PSG, contrairement à ce qu’annoncent L’Équipe et le Parisien —, nous poursuivons notre enquête sur le PSG en détaillant le montage mis au point par Colony Capital.

Le montage mis au point par Colony Capital

Rappel des épisodes précédents

Bref rappel des entreprises impliquées, que nous avons longuement présentées dans le premier volet de notre enquête :
- Colfilm SAS est une société créée par Colony Capital en 2001, qui n’avait plus d’objet en 2006. Elle a été utilisée comme holding, afin de racheter le « groupe PSG » à Canal+ au nom de Colony Capital, Butler et Morgan Stanley.
- La HSE SA est la holding de deux entreprises : la SASP d’une part, la Sese SA d’autre part.
- La SASP est la société qui gère le secteur professionnel du PSG, grâce à une convention signée avec l’association Paris Saint-Germain FC.
- La Sese SA est la société chargée de l’exploitation du Parc des Princes.

Qui a vendu quoi ?

En 2006, le groupe Canal+ détenait d’une part 86,9 % du capital de la SASP, et d’autre part 100 % du capital de la HSE SA, elle-même détentrice des 13,1 % restant du capital de la SASP — ainsi que, par ailleurs, de 100 % de la Sese SA. Ce sont ces deux participations détenues par Canal+ qui ont été cédées à Colfilm SAS au printemps 2006.

Quelques mois plus tard, afin de simplifier la structure de l’actionnariat, Colfilm SAS a apporté à la HSE SA l’ensemble des titres de la SASP qu’elle détenait — en contre-partie d’une augmentation de capital. Depuis octobre 2006, Colfilm SAS détient donc 100 % de la HSE SA, qui elle-même détient 100 % de la SASP et 100 % de la Sese SA.

Pourquoi faire intervenir Colfilm SAS ?

Faire supporter au PSG le coût de son rachat

Au lieu de racheter directement le « groupe PSG », les nouveaux actionnaires — Colony Capital, Butler et Morgan Stanley — ont préféré faire intervenir un intermédiaire : l’entreprise Colfilm SAS. Il s’agit d’un montage classique pour les fonds d’investissement : l’entreprise cible est rachetée à son ancien propriétaire via une holding créée par les nouveaux actionnaires, qui souscrit pour cela un emprunt bancaire. Ce dispositif — qualifié d’« acquisition avec effet de levier », ou « LBO » — permet de faire supporter à l’entreprise rachetée le coût de son propre rachat. Le remboursement de la dette est ensuite assuré par des remontées de dividendes de l’entreprise cible vers sa holding.

En l’occurrence, Canal+ a vendu le PSG à Colfilm SAS, qui est ainsi devenue la nouvelle holding du club. Mais celle-ci n’étant qu’une coquille vide, elle a dû s’endetter pour pouvoir payer Canal+. Cet emprunt n’a pas été souscrit auprès d’un établissement bancaire, mais auprès des acheteurs eux-mêmes. Ainsi Colony Capital — de même que Butler et Morgan Stanley lorsqu’ils étaient co-actionnaires à parts égales avec le groupe de Sébastien Bazin — est-il rémunéré pour le prêt qu’il a accordé au « groupe PSG »… afin d’en devenir lui-même propriétaire !

Concrètement, la dette de Colfilm SAS à l’égard de Colony Capital comprend plusieurs millions d’euros d’intérêts — 1,7 M€ sur la seule année 2009 — en rémunération des emprunts nécessaires au rachat du « groupe PSG ». Cerise sur le gâteau : lorsque la presse spécialisée se penche sur le sujet, son inculture économique la conduit à estimer que si Colfilm SAS est lourdement endetté, c’est en raison de « résultats sportifs en deçà des objectifs, d’une masse salariale importante et d’un déséquilibre dans la balance des transferts » (le Parisien, février 2010). Un comble ! (voir nos explications détaillées sur les erreurs du Parisien dans la journée)

Notons enfin que la remontée de dividendes s’est révélée impossible jusqu’à présent, le club parisien n’ayant pas dégagé le moindre bénéfice depuis 2006 — au contraire, la SASP présente un déficit cumulé de 60 M€ depuis l’arrivée de Colony Capital.

Des raisons fiscales

Le deuxième intérêt majeur d’un tel dispositif est de réaliser des économies d’impôts, les déficits fiscaux de la holding — elle ne génère aucun revenu, mais a des charges d’intérêts élevées — étant imputés sur les bénéfices des autres sociétés du groupe [1].

Toutes les entreprises du « groupe PSG » sont ainsi intégrées fiscalement dans Colfilm SAS. Autrement dit, celle-ci est la seule entité redevable de l’impôt sur les sociétés pour le groupe comprenant la SASP, la HSE SA, la Sese SA et PSG Merchandising. Les éventuelles économies d’impôts réalisées par le groupe sont conservées par Colfilm SAS.

Enquête : organigramme, comptes, transferts, salaires

Enquête sur le rachat du PSG par Colony Capital en 2006 :

- Enquête : le PSG supporte le coût de son propre rachat
- Enquête : la vente du PSG de Canal+ à Colony Capital
- Les finances du PSG revues et corrigées par le Parisien

Enquête sur les dettes du « groupe PSG » et l’investissement de Colony Capital :

- Combien Colony a-t-il réellement investi au PSG ?
- Enquête : les dettes des entreprises du « groupe PSG »

[1] Concrètement, si la holding constate un déficit fiscal de 5 M€ tandis que ses filiales réalisent un bénéfice de 20 M€, le groupe sera redevable d’un impôt sur les sociétés calculé sur un résultat fiscal global de +15 M€ (20 M€ - 5 M€), ce qui lui assurera une économie d’impôts.