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[OM-PSG] Et si j’étais né Marseillais ? (par Arno P-E)
Chronique décalée
Dans la peau d’un Tonini
vendredi, 23 octobre 2009, par Arno P-E

Je ne sais pas vous, mais moi j’aurais bien aimé de devenir président de l’Épad… Sauf que voilà, je ne suis pas né fils de président de la République. Le coup de pas de bol. Allez, on ne va pas se plaindre non plus, ça aurait pu être pire : au moins, je suis né en région parisienne. Après tout, certains n’ont pas eu ce bonheur.

C’est vrai quoi, à l’occasion de notre visite annuelle au pays des gars-qui-ont-le-soleil, il est bon de se remettre en cause, et de se poser quelques questions. Par exemple, quelle serait notre vie si nous avions vu le jour plus au sud. Dans une de ces jolies maternités qui fleurent bon le thym et la lavande sauvage, loin, très loin au sud de la Porte d’Orléans [1]… Par delà la Francilienne, là où l’éclat de la Ville Lumière n’est plus qu’un souvenir. Au-delà même de ces contrées inhospitalières qui forgent les hommes les plus rudes, ces travailleurs de la terre qui nourrissent la France.

Un monde où Brandao est beau…

Mais non, pas Rungis ! Je vous parle de ces terres inconnues que seuls les braves osent affronter lorsqu’ils organisent de dangereuses expéditions appelées vacances d’été ! La voilà la véritable question, celle qui devrait occuper les plus grands penseurs de notre siècle (ce BHL, jamais là quand on a vraiment besoin de lui…) : que serions-nous devenus, nous autres supporters du PSG, si par jeu cruel le destin nous avait fait naître marseillais ? Difficile à imaginer non ?

PSGMAG.NET a mené l’enquête auprès d’un panel quasi représentatif de fans marseillais. L’équipe du site a parcouru maints forums sudistes, écouté RMC deux heures de suite [2], et épluché La Provence. Voilà les conclusions de ce voyage virtuel au pays de Jean-Pierre Foucault, Patrick Bosso et Zinédine Zidane.

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Le maillot de Mandanda

Pour commencer, si nous étions nés dans la ville d’Aubagne, sous le Garlaban couronné de chèvres — mais pas au temps des derniers chevriers parce que faut pas déconner non plus… —, c’est toutes nos références esthétiques qui seraient à reconsidérer. En premier lieu, et même si cela paraît impossible à un être humain normalement constitué, l’étude du supporter marseillais exilé en région parisienne semble montrer que nous trouverions très élégant ce fruit de l’imagination d’un styliste cocaïné qui sert parfois de maillot à Mandanda. Je partage le frisson qui vous parcourt les omoplates : certes, avec notre tunique à pois, nous ne sommes pas gâtés cette saison, mais tout de même ! S’imaginer portant cet ersatz de sac poubelle sur le dos, ça calme d’entrée de jeu. Diable, mais c’était donc vrai : ils sont bien différents de nous alors ?!?

À propos de Mandanda, il y a pire. Si nous avions usé nos culottes courtes sur les marches du Vieux-Port, nous exigerions sans sourire que ce gardien goûte de nouveaux aux joies d’une titularisation en équipe de France. Non pas parce que le spectacle du gardien de l’OM en train de récupérer le ballon dans ses filets a toujours un je ne sais quoi de réjouissant dont on ne se lassera jamais, quelle que soit l’équipe, mais bien parce que dans notre esprit, Mandanda serait le meilleur gardien du Vélodrome, donc de France, donc du monde (visible et invisible). Ça fait bizarre non ? Le fait que si Landreau avait commis moitié moins de boulettes que le portier marseillais l’an passé, alors il n’aurait pas eu besoin d’aller à Lille pour attendre qu’on lui pète nous-mêmes un genou ou deux ? Détail… Que Steve Mandanda soit encore sur la liste d’attente du Professeur Lantiéri pour une greffe des deux mains ? Pécadille, peuchère !

Si nous étions nés Marseillais, c’est d’ailleurs sur tout le groupe de l’OM que nous poserions les yeux de Chimène. Tel Ménès, nous affirmerions que Mamadou Niang possède les caractéristiques d’un attaquant de classe mondiale. Bon, un attaquant qui ne tourne qu’à 13 buts de moyenne par saison de L1 depuis qu’il s’est révélé à l’OM, mais à part ça, de classe mondiale quand même. Taye Taiwo serait un joueur technique, susceptible d’évoluer dans un grand championnat (dès qu’il aurait enfin compris la règle du hors-jeu). Hatem Ben Arfa endosserait le costume du nouveau – nouveau – nouveau - nouveau Zidane. Pas du tout un joueur égoïste et incapable de lâcher la balle, mais plutôt… attendez que nous consultions nos notes… un minot qui veut trop bien faire par amour de la Canebière, et qui du coup cherche parfois à créer la différence grâce à sa merveilleuse technique individuelle. Parfois. Diawara, Mbia et Rool ne seraient pas des bouchers, mais des footballeurs au jeu engagé. Des Marseillais respectueux de l’héritage de leurs glorieux aînés que sont Patrick Blondeau, Carlos Moser, Éric Di Méco et consorts. Et ça marche comme ça pour l’ensemble de l’effectif. Merveilleux, non ?

Même avec Heinze : par un étrange effet de symétrie temporelle, autant avant août dernier nous l’aurions trouvé haïssable, violent, sur-côté, et honteusement protégé par des arbitres aux ordres de la capitale, autant depuis deux-trois mois ça irait mieux. Alors certes, pour vous, actuellement c’est un peu l’inverse. Alors que jusqu’ici vous donniez du « Gaby » en parlant de lui, depuis août et la discrète cérémonie d’immolation du vieux maillot floqué à son nom, le défenseur argentin a davantage droit à des sobriquets remettant clairement en cause son honnêteté, voire ses orientations sexuelles, ce dont nous reparlerons plus loin.

Eh bien si vous aviez vu le jour dans les Bouches-du-Rhône… bon, en y réfléchissant bien, ces joueurs qui n’ont besoin que d’un chèque pour changer d’avis du tout au tout et revenir sur leurs déclarations énamourées, du moment qu’ils mouillent le maillot hein… Et puis il ne faudrait pas se voiler la face, et refuser de comprendre que le foot moderne c’est aussi la loi du marché, et tout ça, tout ça quoi… Hum.

Un peu de soleil vous change une vie

Marseillais, vous auriez acquis d’étranges réflexes. Comme celui d’invoquer à tout bout de champ un étrange particularisme local en guise d’excuse. Au PSG, on casse la voiture de Sylvain Armand. Là, dans le sud, rien à voir : la voiture de Robert Pirès ne s’est retrouvée sur le toit que par la grâce du folklore local. On sent tout de suite la nuance. Bon, peut-être pas quand on est le propriétaire de la voiture, mais sinon, oui. Explication ? C’est que chez nous, à Marseille il y a le soleil, alors ça n’est pas pareil.

Leçon deux, l’insulte à l’arbitre. Avant, quand vous sous-entendiez que l’homme en noir recourait à de douloureuses pratiques anales, vous étiez homophobe. Là-bas au moins, vous pourriez le traiter d’enculé, pas de souci. En effet il ne faut pas y voir le moindre rapport avec les injures parisiennes : quand on a vécu ses tendres années au bord de la méditerranée, il paraît que « enculé » prend valeur de ponctuation. De la vulgarité à géographie variable somme toute…

Cette enquête soulève toutefois pas mal de questions restées sans réponse. Nous n’avons par exemple pas réellement réussi à comprendre ce que cela pouvait faire de vivre dans un monde où Anigo est un homme à la gouaille sympathique, qui défend les valeurs de sa ville contre les attaques d’un obscure pouvoir central : un monde dans lequel on croit dur comme fer que le PSG est protégé par de lointaines instances dirigeantes continue de nous laisser rêveurs… Ce serait tellement beau. Il semblerait même que, si nous avions vu le jour à Marseille, certains d’entre nous réussiraient à trouver Paganelli supportable ! Mais là, cela tient plus de la science-fiction que d’autre chose, avouons-le.

En contrepartie, en tant que fans de l’OM, il nous faudrait apprendre à vivre avec de lourds remords. De ces erreurs passées qui vous tordent la conscience. Je n’évoque même pas les quelques poignées de billets enterrés de par les terrains de L1 : il paraît qu’en vrai il n’y avait pas besoin d’acheter ce match et que donc ça va, maintenant on peut rendre le titre à l’OM, c’est bon.

Il n’est pas non plus question ici des bouteilles d’eau infusées aux dragées Fuca généreusement distribuées aux adversaires lors des joutes européennes, de la piqûre du jeudi — sauf pour Cantona —, ou d’histoires de vestiaires trafiqués au berlingot de Soupline radioactif. En regard du véritable drame Phocéen, cela n’est rien… Vivre dans la peau d’un fan de l’OM, cela dessine un destin infiniment plus tragique.

Comment font-ils pour se regarder dans la glace jour après jour, sachant qu’aucun d’entre eux n’a jamais eu le courage d’expliquer à Deschamps que non seulement sa coiffure n’est plus à la mode depuis 1982, mais qu’en plus vu son gabarit, le survêtement blanc c’est juste pas possible ? Parce que génération élevée au sein de la spéciale « nuque-longue » de Chris Waddle ou pas, on ne nous fera jamais croire que la tragédie capillaire de DD ne retourne pas les estomacs à l’OM Café. Je veux bien qu’un monde oppose Parisiens et Marseillais, mais tout de même…

Interview exclusive de Jérôme Latta sur PSGMAG.NET :

- Première partie : les Cahiers passés au crible — le journal, le site et le forum —, et leur sentiment sur la presse sportive en général.
- Deuxième partie : la critique des médias, les journalistes.
- Troisième partie : la médiatisation du PSG et de ses idées reçues.
- Quatrième partie : le Ballon de Plomb de Bernard Mendy (dimanche).

Crédit photo : scarabée

[1] Eh oui, cela paraît incroyable, mais il y a aussi des maternités au sud de la Porte d’Orléans !

[2] On a arrêté quand nos oreilles se sont mises à saigner, et qu’un de nos rédacteurs a déclaré qu’il trouvait que Di Méco il dit pas que des conneries : ça devenait vraiment trop dangereux.