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Rendez son maillot au PSG ! (chronique d’Arno P-E)
Les pyjamas 2009/2010 du PSG sont en vente
Leur maillot n’est pas le nôtre — rendez-nous nos couleurs !
mardi, 9 juin 2009, par Arno P-E

Paris, 30 mai 2009, vingt-trois heures. Le PSG vient de concéder le nul face à Monaco. Après y avoir cru jusqu’au bout, cette fois il faut bien accepter la sentence : nous serons privés d’Europe. Terrible coup derrière la tête. Pourtant, il y a encore pire. Le même jour, de vraies-fausses vidéos publiées sur Internet par l’équipementier du club confirmaient ce que nous redoutions : pendant toute une saison, le Paris Saint-Germain sera bien affublé d’un maillot pyjama.

Débat sans fin. Comment réunir à la fois ceux qui veulent conserver une certaine image du football non mercantile, respectueux des traditions, familial, accessible… et ceux qui se disent que l’argent étant le nerf de la guerre, si on veut des stars, donc du haut niveau et donc des titres, il faudra bien consentir à quelques sacrifices ?

Augmenter un peu le prix des places. Jouer à des horaires bizarres, pour satisfaire aux besoins de télévisions. Interdire ces porteurs de fumigènes qui terroriseraient les braves pères de familles. Participer à des coupes en plastique doré, plus rémunératrices que d’autres. Et renouveler les maquettes des maillots pour en revendre chaque année.

Vous nous avez pris notre fierté

Sauf qu’il faut prévenir les décideurs, les dirigeants et les vendeurs de tissu : il y a des dérives que nous ne pouvons pas accepter. Des combats que les supporters ne refuseront jamais de livrer. Parce qu’il y va de notre existence.

Vous nous avez déjà pris trop de choses. Rendez-nous nos véritables couleurs.

Vous nous avez pris la fierté de supporter une équipe qui se battait pour conquérir l’Europe. D’un Paris Saint-Germain cinq fois demi-finaliste de coupes européennes, membre de droit du G14, vous avez fait un nain continental, puis un nain de la L1. Nous sommes restés. À Sochaux, pour lutter pour la survie du club, nous étions là, la rage au ventre. Sous la pluie diluvienne, sous les railleries des paysans trop contents d’assister à une possible mise à mort, sous l’éteignoir de la peur, nous étions là, à chanter nos couleurs. Rendez-les nous !

Vous nous avez pris notre fierté d’avoir un président amoureux du Paris SG, un historique d’entre les historiques. Un garant du temps où le club ne méprisait pas ses supporters. Tout ça pour lui adjoindre un vendeur de journaux de petites annonces ? Un sudiste au bilan désastreux, un parvenu, un arriviste débarqué à son tour un mois plus tard. Vous avez sacrifié un des derniers survivants de l’ère Borelli pour un brasseur d’air qui n’aura jamais aussi bien porté son nom. Mais nous sommes restés, conscients de représenter le PSG et ses couleurs bien plus que lui ne pourra jamais le faire. Rendez-les nous !

Vous nous avez pris la fierté de défendre le Paris SG aux côtés des Boulogne Boys. Plus de deux décennies d’histoire du club détruits pour une banderole débile. Tous ces tifos, tous ces chants, ces matches au soutien sans faille et cette identité, foulés au pied. Vous avez pris ça au Kop of Boulogne, mais vous l’avez aussi pris à tout le club. Ils n’étaient pas parfaits mais c’étaient nos frères et vous les avez chassés. Nous sommes restés quand même, et eux aussi. Forcés de se cacher, ou de taire leur nom. Mais ils sont restés et ils ont continué à porter les couleurs de leur club, dans leur tribune. Rendez-les leur !

Vous nous avez pris la fierté de voir Paris retrouver un possible podium, en minant le vestiaire à un mois de la fin du championnat. Bêtise ou fait exprès, vous avez laissé un groupe exposé aux rumeurs, sans personne pour le protéger. Jusqu’au bout, le Parc a pourtant été plein, et fervent pour tenter de soutenir ces joueurs trop fragiles. Les supporters ont répondu présent, alors même que certains laissaient le navire sans pilote. Pour le club. Pour notre maillot.

Et maintenant, c’est ce maillot que vous voulez nous prendre ? Cette ultime fierté, ce pour quoi nous nous sommes toujours battus. Nos couleurs, le bleu-blanc-rouge-blanc-bleu… Tout ce qu’il nous reste.

Non.

Un combat perdu d’avance

Non ! De Kayseri à Braga, de Lille à Marseille, et au Parc, toujours, ce maillot était présent. Étiez-vous donc si occupés dans vos loges, que vous ne l’ayez pas remarqué ? C’est notre maillot, il est la raison de nos combats. Partout où le Paris Saint-Germain va, des amoureux vont l’aider. Au prix de quels efforts, au prix de quels sacrifices, ils ne vous le diront pas, mais des Parisiens étaient là-bas. D’un bout du Portugal jusqu’aux confins de la Turquie, des anonymes ont tout donné pour honorer ces couleurs-là. C’est notre lien. L’amour que nous leur portons nous rassemble, tous. C’est un symbole.

On ne les changera pas. Le PSG n’est pas une marchandise. Le PSG n’appartient pas aux vendeurs de tissus. C’est à ces gars-là, qu’ils soient de Boulogne, d’Auteuil ou d’ailleurs que le Paris Saint-Germain appartient. Pas à vous ! Alors rendez-nous nos couleurs. Rendez-nous notre club !

On pourra toujours dire que ce combat est inégal. Que ces maillots rayés correspondent à la nouvelle charte graphique de l’équipementier, que des usines ont déjà commencé la production, que de toutes manières, quoi qu’il arrive, les joueurs parisiens porteront cette tunique base-ball. On pourra toujours nous répondre que refuser ce maillot serait inutile, qu’avec le temps certains s’y feront. Qu’il s’agira de l’accepter, bon gré mal gré, parce que le PSG jouera ainsi et que contents ou non, ça n’y changera rien. Oui, ils nous diront tout ça ! Ils nous montreront même les chiffres des ventes, parce que beaucoup l’achèteront, croyant ainsi représenter le club. Surtout si un nom venait enrichir le vestiaire lors du mercato. Ils nous expliqueront la futilité de notre conflit.

Ils auront raison. Cette lutte est désespérée. Et perdue d’avance. Ce n’est qu’un combat de l’inutile.

C’est même pour cela qu’il faut le livrer. Question de fierté. Nous avons trop longtemps accepté que l’on nous dicte notre conduite. Pas question de les voir nous dicter une Histoire réécrite. Nous sommes parisiens et les Parisiens n’ont jamais abdiqué face à ce qui leur semblait injuste, ou mauvais. Cela ne changera pas. Quand il le fallait, Paris a toujours su se révolter. C’est notre identité. Même quand tout était perdu. C’est ce que nous sommes. Fluctuat nec mergitur.

Il est impensable de baisser les bras sur cette question. Parce que ce combat est fou, et vain. Parce que nous ne nous battrons que pour faire respecter des couleurs. Les nôtres. Parce qu’ils ne nous comprendront jamais. Parce que nous aimons le Paris Saint-Germain et qu’ils ne savent même pas ce qu’est ce club. Parce que la dernière fierté qu’il nous reste, c’est notre maillot. Parce que notre cœur bat bleu-blanc-rouge-blanc-bleu. Parce qu’ici c’est Paris. De Kayseri à Braga. Mais surtout depuis Hechter jusqu’à aujourd’hui. Et à jamais.

Leur maillot n’est pas le nôtre.