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Protégeons le football, sanctionnons le PSG (2/7)
En finir avec les gestes dangereux
Le pouvoir étant centralisé à Paris, il y a sans doute anguille sous roche…
mardi, 17 mars 2009, par Vivien B.

Évoquez en province une quelconque décision impliquant le PSG et une instance de pouvoir — qu’il soit médiatique, politique ou footballistique —, vous entendrez rapidement parler de la protection dont bénéficierait le club de la capitale (cf. Nicolas Dieuze en mai dernier). En matière de sanctions disciplinaires prononcées par la LFP ou la FFF, c’est pourtant souvent le contraire : le Paris SG sert de laboratoire de sanctions. Les tirages de maillot dans la surface ? Seul Mario Yépès est sanctionné. Les simulations ? Seul Fabrice Fiorèse. Les démêlés des entraîneurs avec les arbitres ? Luis Fernandez. Les exemples foisonnent, nous en avons choisi quelques uns.

De Frau à Yépès en passant par Pichot ou Yépès — eh oui, encore —, les joueurs du PSG font l’objet d’une attention toute particulière.

Frau blesse Noro : 2 mois ferme

Le 14 octobre 2006, Paris reçoit Sedan au Parc des Princes lors de la 9e journée de Ligue 1. Après avoir ouvert le score en début de match, Pierre-Alain Frau se rend coupable d’un mauvais geste sur Stéphane Noro, en fin de première période : il tend la jambe pour récupérer la balle à mi-hauteur, mais arrive en retard et son pied heurte le Sedanais, qui sort sur blessure — il sera indisponible cinq mois. L’arbitre exclue logiquement le joueur parisien, qui reçoit là le premier carton rouge de sa carrière.

Dès la fin de la rencontre, Pascal Urano, le président du CSSA, demande sanction : « En fonction de l’indisponibilité de Stéphane, je me réserve le droit de saisir le conseil de discipline de la Ligue », explique-t-il dans les colonnes de L’Équipe. Ledit conseil n’existe pas, mais la commission de discipline se saisit bel et bien de l’affaire, comme elle le fait pour toutes les expulsions. À la différence près que Frau est suspendu à titre conservatoire dès le jeudi 19 octobre, en attendant que la sanction soit prononcée la semaine suivante — le même jour, L’Équipe rapporte que « le défenseur troyen Blaise Kouassi, accusé d’être l’auteur d’une “fourchette” (doigts dans les yeux) sur le Lillois Plestan, a écopé lui d’un match avec sursis. La commission de discipline a revu les images et estimé que le geste n’était pas intentionnel malgré l’attitude menaçante. »

Jeudi 27 octobre, la sanction tombe : Pierre-Alain Frau est suspendu deux mois ferme, soit pour les 10 matches que le PSG jouera d’ici la trêve hivernale. Jacques Riolacci, le président de la commission, a justifié ainsi cette décision extraordinaire : « Frau s’est rendu coupable d’une action violente non maîtrisée. Bien sûr, il n’avait pas l’intention de faire mal, mais il n’en reste pas moins qu’un joueur sedanais est immobilisé six mois après un geste qui méritait donc une sanction. Cela ne veut pas dire que nous cataloguons le joueur Frau, qui n’est pas un de nos habitués, parmi les récidivistes et les “brebis galeuses” qui hantent les terrains. Et si nous avions eu la sensation d’un geste volontaire, la sanction aurait été beaucoup plus lourde. Dans de tels cas, il nous est arrivé de mettre six mois à un joueur. [Il n’y a] pas de volonté de faire un exemple. »

L’affaire rappelle le seul précédent dont nous ayons connaissance : le 8 octobre 1997, lors de PSG-Guingamp, Paul Le Guen blesse Charles-Édouard Coridon sur un tacle en retard, mais sans méchanceté apparente. Indisponible trois mois, le futur Parisien réclame vengeance : il veut que Le Guen, qui n’avait pas été averti sur cette action, soit suspendu tant qu’il ne pourra pas rejouer. Alors que Vannuchi, pour avoir ouvert l’arcade sourcilière de Jérôme Leroy avec les poings lors du même match ne sera suspendu qu’un match, le natif de Pencran sera sanctionné d’un mois de suspension, soit quatre matches !

Toujours dans le quotidien sportif, Noro évoque la sanction qui touche Frau : « C’est dur pour lui. Il n’a pas, en effet, la réputation d’un méchant. Son geste tient sûrement plus de la maladresse que de l’acte délibéré. Mais devant la répétition en boucle des images télé, il était difficile pour la commission de ne pas se montrer rigoureuse. » PAF formule la même hypothèse sur lequipe.fr : « Je suis conscient que je méritais une sanction, j’ai blessé un joueur, mais deux mois, c’est lourd. C’est le premier carton rouge de ma carrière, je ne suis pas un habitué des gestes méchants, je ne pense pas être un joueur agressif. Je trouve ça très sévère. Je pense qu’on a voulu faire de mon cas un exemple ou un avertissement pour les habitués de ces choses-là. J’ai l’impression que la commission n’a pas tenu compte de mon comportement tout au long de ma carrière. Peut-être que par rapport au battage médiatique qui a été fait, elle s’est sentie obligée de mettre une grosse sanction. »

Regrettant dans un communiqué « la sévérité extrême de cette décision […] complètement disproportionnée au regard du geste commis et sans commune mesure avec les autres décisions prises le même jour », le PSG fait appel. Le 23 novembre, la commission supérieure d’appel de la FFF confirme la sanction de la Ligue. Même Pierre Ménès, qui est pourtant le premier à trouver « comiques » des événements d’une grande banalité qui arrivent au PSG comme partout ailleurs, a relevé la supercherie : « Une fois de plus, le foot français se fait la cerise sur le dos du PSG, écrivait-il sur son blog lors de la suspension de Frau. Aujourd’hui, on veut encore faire un exemple avec un Parisien. Et c’est nul… »

D. Cissé blesse Yépès : aucune sanction

Quelques mois plus tard, le 4 février 2007, le PSG se déplace à Marseille. À la demi-heure de jeu, Mario Yépès dégage un ballon. Djibril Cissé se précipite la semelle en avant, et en retard ; il ne touche que la cheville du défenseur parisien, qui doit se faire soigner. L’arbitre, Bertrand Layec, ne donne qu’un carton jaune à l’attaquant marseillais, et le Colombien reprend la partie quelques minutes plus tard (sic). Il sortira finalement à la mi-temps — remplacé par Boukary Dramé —, victime d’une fracture de la malléole externe de la cheville gauche. Jamais avare d’une bonne blague, Jérôme Touboul écrira dans L’Équipe que Yépès fut « touché à la cheville gauche en frappant dans le pied droit de Cissé sur un dégagement ». De son côté, Guillaume Dufy félicitera Bertrand Layec : « Dans un match qui s’annonçait tendu, il a su tenir les joueurs. En tout, il n’aura sorti que quatre cartons. »

Après le match, l’arbitre persiste dans son appréciation des faits : « C’est dommage pour Yepes. Je suis attristé et je lui adresse tous mes vœux de rétablissement. […] J’ai revu les images. Alors, c’est vrai, sur le vingt-cinquième ralenti, à la loupe, c’est impressionnant. Mais avec le recul, pour moi, ça ne mérite pas un carton rouge, car il n’y a pas la volonté de mettre en danger l’intégrité physique du joueur. Après, on peut penser le contraire, ce n’est pas un scandale. Mais je considère que le Marseillais joue le ballon. Le contact est appuyé, mais il n’y a pas d’agression. »

Chacun se fera son opinion avec les images — nous n’avons pas eu besoin d’attendre le vint-cinquième ralenti pour cela :


Djibril Cissé découpe Mario Yépès, mais sans les bras. Il n’est donc pas sanctionné.

Également interrogé par le quotidien sportif, Djibril Cissé se montre d’une grande immaturité : « Je suis désolé car je ne veux pas le blesser. Il y a le ballon entre nous deux et je mets la semelle. Mais c’est plus sa réaction sur le moment qui me gêne un peu… (sic !) Je vais m’excuser et lui, il m’envoie presque ch… Encore une fois, si sa saison est terminée, je suis désolé pour lui. Mais c’est dommage qu’il pense que je l’ai fait exprès. Ce n’était pas mon intention. […] Je me suis excusé sur le terrain. Il m’a envoyé ch… comme un chien. […] Le Monsieur pense que je l’ai fait exprès ? Tant pis pour lui. Je ne vais pas me mettre à genoux non plus. […] Je me suis excusé. Je ne peux pas lui donner mon pied pour qu’il rejoue. […] Moi, je n’ai pas reçu de fax ou de coup de téléphone du Chinois et je n’ai pas pleuré. Alors qu’ils arrêtent un peu de me faire ch… Je ne l’appellerai pas. […] Si je suis déçu par ce qui s’est passé ? Oui, carrément. C’est surtout de dire que je ne me suis pas excusé qui me déçoit le plus (sic). C’est très moyen. Franchement, très moyen. Personne n’a rien dit en revanche quand, ensuite, il me met un coup de coude dans le cou. Il le sait et je le sais. Alors qu’ils arrêtent un peu. » Une réaction tout juste qualifiée de « désarmante » par les journalistes de L’Équipe, qui estiment que le Marseillais « a réagi de façon étonnante à l’indisponibilité du Parisien ».

Quant à Alain Cayzac, s’il a, comme souvent, le bon discours, il ne parvient pas à le rendre audible : « Je ne vais pas faire ce que j’ai reproché à Urano d’avoir fait contre nous quand Noro s’est blessé dans un choc avec Frau, à savoir réclamer une suspension aussi longue que l’indisponibilité du joueur blessé. Non, ce n’est pas mon rôle de demander la punition d’un joueur adverse. Il y a des commissions compétentes pour cela. J’aimerais juste qu’il y ait une jurisprudence claire lorsqu’on est face à ce genre de blessure grave. […] Si c’est la règle, elle doit l’être pour tout le monde.  »

Le lendemain, un sondage sur lequipe.fr interroge sur la nécessité de « punir sévèrement Djibril Cissé ». Une majorité (54 %) des 138 000 votants répond oui. Ce n’est pas l’avis de la commission de discipline, qui ne donne aucune sanction au Marseillais. Son président, Jacques Riolacci, fait dans la nuance : « Il s’agit d’un incident de jeu avec une conclusion accidentelle. Cela n’a absolument rien à voir avec le cas de Pierre-Alain Frau. Dans ce cas précis, il y avait eu un geste non maîtrisé, maladroit mais dangereux. Pour ce qui concerne Cissé, c’est un incident de jeu malheureux. » Un « incident de jeu » qui n’était pas dangereux, mais qui aura tenu Mario Yépès éloigné des terrains durant trois mois

Alain Cayzac crie au « scandale », mais l’affaire ne fait pas beaucoup de bruit : « Je ne suis pas pour la mort du pécheur mais quand je vois que Frau a été suspendu deux mois pour un geste du même acabit, je ne comprends pas. Je vais attendre de connaître un peu mieux le dossier pour en dire plus, mais cela signifierait que le PSG est dans le collimateur des instances. Je ne veux pas y croire, je veux des explications. Et pour rester positif, je pense que ça doit être une erreur. Avec la suspension de Frau, le PSG a subi un très gros préjudice. Dans son cas, la loi a été mal appliquée, le PSG ne restera pas immobile. » Les choses resteront toutefois en l’état. Mais puisque cela n’a rien à voir…