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Les coulisses de la médiation PSG-supporters
Interview de Liberté pour les abonnés
Jérémy Laroche, le président de l’association, répond à nos questions
samedi, 18 décembre 2010, par Vivien B.

À la veille du match PSG-Monaco, et quelques jours après l’annonce par Robin Leproux de la mise en place d’abonnements aléatoires, Jérémy Laroche — le président de l’association Liberté pour les abonnés — a répondu à nos questions : comment s’est déroulée la médiation ? quels échanges les supporters ont-il eu avec le club ? quelles propositions ont été faites au PSG pour accompagner le retour d’abonnements fixes ? quel est le mot d’ordre de la manifestation qui aura lieu durant PSG-Monaco ? comment se passent les déplacements ?

Lundi avait lieu une réunion entre le PSG et les représentants des supporters au sujet des abonnements, clôturant la médiation menée par Alain Cayzac et Franck Borotra ces dernières semaines. Nous avons voulu en savoir plus sur les échanges entre le club et ses supporters, les propositions faites par ces derniers pour accompagner le retour des abonnements fixes qu’ils revendiquent, et les actions qui seront menées ce samedi soir lors du match PSG-Monaco au Parc des Princes. Jérémy Laroche, président de l’association Liberté pour les abonnés, a répondu à nos questions.

Interview réalisée vendredi 17 décembre 2010.

La médiation avec Alain Cayzac et Frank Borotra

Comment s’est déroulée la médiation ?
Alain Cayzac nous a appelé pour nous annoncer qu’il avait été nommé médiateur avec Franck Borotra. Il nous a proposé un rendez-vous, que nous avons accepté. La réunion a duré près de deux heures, durant lesquelles ils se sont montrés attentifs et réceptifs à ce que nous disions. Ils étaient véritablement à notre écoute, tout en nous disant évidemment quand ils n’étaient pas d’accord. Nous avons débattu sur certains points.

Lesquels ?
Par exemple, ils ne comprennent pas l’amour que nous avons pour une tribune : pour eux, nous devrions pouvoir être heureux dans n’importe quelle tribune. Nous leur avons bien expliqué qu’Auteuil et Boulogne, c’étaient deux façons de supporter qui étaient différentes, une à l’italienne et une à l’anglaise, et qu’ensuite se développe également un sentiment d’appartenance à un lieu. Nous avons pris l’exemple des régions : on ne va pas demander à un Basque de dire qu’il est nordiste ! Nous leur avons également expliqué que c’était important qu’il y ait des associations pour maintenir un lien entre les supporters et le club. Nous ne sommes pas rentrés dans les détails, mais nous avons insisté sur l’importance des associations. Nous avons également beaucoup échangé sur le fait que la situation actuelle ne plaisait à personne, et qu’il fallait que nous obtenions un vrai geste de la part du club pour pouvoir avancer un minimum.

« Nous espérions avoir un échange avec le club à l’issue de la médiation »

Avez-vous évoqué la charte 12 durant vos échanges ?
Pas du tout ! La responsabilité du président d’une association, cela fait partie des sujets sur lesquels nous avions des choses à proposer. Mais ce qu’ils ont prévu, un contrôle total par le club et par un comité d’éthique composé d’associations dont je ne vois pas le rapport avec le monde des tribunes, c’est aberrant.

À combien de réunions avec les médiateurs avez-vous participé ?
Une seule. Je vous avoue que nous avons été très déçus. En résumé, ils ont rencontré une fois les différentes entités, puis ils ont rédigé un rapport qu’ils ont rendu à Leproux — mais que nous n’avons pas consulter, ce qui est d’ailleurs bien dommage. Nous pensions qu’avant que la direction ne prenne ses décisions, il allait y avoir au moins un bilan avec nous, pour confronter nos propositions et les leurs, qu’il puisse y avoir un échange. C’est vrai que ce n’est pas une négociation, mais tout de même : à mon sens, une médiation, ce n’est pas juste un rendez-vous avec chacun des interlocuteurs puis un rapport à la direction, qui annonce alors des décisions qu’elle avait déjà actées depuis longtemps…

La réunion de lundi avec Robin Leproux

Quel était l’ordre du jour de la réunion de lundi avec Robin Leproux ?
Il s’agissait de faire un bilan de la médiation et de nous annoncer de nouvelles mesures.

Quels étaient les participants ?
Côté PSG, il n’y avait que Robin Leproux, Franck Borotra et Alain Cayzac. Le département supporter n’était pas représenté. Côté supporters, toutes les entités étaient présentes sauf les associations dissoutes.

La K-soce Team était-elle présente ?
Oui, elle était là.

« Nous n’avons pas pu discuter avec Robin Leproux : il nous a annoncé les mesures, puis il est parti donner une conférence de presse. »

Comment la réunion s’est-elle déroulée ?
Pendant environ 40 minutes, Franck Borotra et Alain Cayzac ont dressé un bilan, en développant leur vision des choses à propos de la médiation. Ensuite, Robin Leproux nous a annoncé la mise en place d’abonnements aléatoires. Mais, alors qu’ils savaient pertinemment que nous y étions opposés, quand nous avons commencé à contre-argumenter pour engager une discussion ou ne serait-ce qu’un échange de points de vue, Leproux nous a répondu : « Désolé, je n’ai pas le temps, lisez la charte 12 », et il est parti parce qu’il avait sa conférence de presse dans la foulée.

Que reprochez-vous à Robin Leproux ?
Nous faire venir pour faire un bilan et qu’une heure après il y ait la même réunion d’organisée avec les médias, c’est bien la preuve qu’il n’était absolument pas prêt à discuter avec nous. Nous n’avons pas pu contre-argumenter sur quelque sujet que ce soit, il n’y a pas eu le moindre échange avec nous. C’était un simple discours : « On fait les questions et les réponses, et vous n’avez rien à dire, de toutes façons c’est comme ça, on l’annonce dans une heure au grand public. » C’est aberrant.

La presse a parlé d’une réunion « tendue ». Qu’en était-il ?
Nous étions effectivement remontés, mais il n’y a eu aucune insulte. Personnellement je n’habite pas très loin du Parc des Princes, donc ce n’est pas très grave, mais certains ont fait plusieurs heures de trajet, ont dû s’organiser pour s’occuper de leurs enfants ou quitter le travail plus tôt — la réunion a eu lieu à 18 heures —, tout cela pour s’entendre annoncer quelque chose dont chacun savait très bien que nous étions contre, et sans nous permettre de discuter. Cette façon de procéder, qui n’a pour seul but que de faire de la communication, c’est vraiment un manque de respect à notre égard.

Quelles évolutions avez-vous observées dans les propositions de Robin Leproux par rapport à vos précédentes réunions ?
Il y a six mois, on le sentait beaucoup plus en confiance que maintenant par rapport à son plan. Nous l’avions rencontré en tout début de saison, avant qu’il ne se rende compte de la désaffection du Parc des Princes. Mais il n’a fait aucune concession depuis cet été. La direction s’est entêtée dans le placement aléatoire. La seule nouveauté, c’est la possibilité de créer des associations. Mais le type d’associations qu’ils veulent créer est inadmissible.

A-t-il justifié durant la réunion les entraves à la liberté d’expression que prévoit le règlement ?
Non. Au contraire, quand il nous a présenté la charte 12 et le retour des associations, il nous a juste dit : « Nous avons fait une charte très simple, qui donne la possibilité de compter jusqu’à 100 membres maximum, 50 dans chaque tribune. » Il n’a absolument pas parlé du comité d’éthique qui va vérifier tout ce qu’elle fait, du fait que le club doit donner son approbation dès qu’une association veut s’exprimer… Tout cela, nous l’avons découvert en lisant la charte.

Les propositions alternatives

Quelles propositions avez-vous faites au PSG ?
La proposition la plus importante, que toutes les entités ont abordée, c’était de rouvrir une partie des virages — les tribunes bleu — avec des abonnements fixes, proposés à tous les anciens abonnés. La situation serait restée en l’état quelques mois puis, si et seulement s’il y a pas d’incident, on aurait rendu progressivement tous les virages aux abonnés. C’était une concession pour que le club puisse constater que nous pouvions vivre ensemble, et pour nous permettre de regagner sa confiance. Mais j’insiste sur le fait que les abonnements auraient été proposés à tous les anciens abonnés, y compris à ceux qui étaient abonnés en rouge [1]. Cette proposition a été totalement passée sous silence par le PSG et les médias.

« Nous proposions un retour progressif pour regagner la confiance du club, et une série de mesures pour travailler sur le fond »

Que proposiez-vous d’autre pour maintenir une situation pacifiée ?
Nous avons réfléchi à toute une série de mesures, mais nous n’en avons discuté qu’au sein de Liberté pour les abonnés. Notre objectif était de pouvoir les mettre sur la table à partir du moment où il y aurait eu un dialogue d’ouvert avec le club.

Pouvez-vous tout de même nous citer quelques exemples ?
Nous proposions de mettre en place des réunions mensuelles obligatoires — sous peine de sanctions — entre les responsables de toutes les entités, pour obliger tout le monde à maintenir le dialogue en permanence ; de renforcer la responsabilité des leaders d’associations — qui se doivent être irréprochables — ; de limiter les drapeaux aux couleurs du club ou aux origines des joueurs ; de définir des sanctions plus appropriées en cas d’écart de comportement des supporters, avec un barème progressif — suspension d’abonnement puis interdiction de stade en cas de récidive — pour responsabiliser tout le monde. En fait, nous sommes prêts à discuter avec le club sur beaucoup de choses, faire beaucoup de concessions par rapport aux identités des associations, à tout ce qui se passe autour des abonnements, mais avant cela il faut que le club nous réhabilite en tant que supporter. Nous avons beaucoup insisté sur le fait qu’il fallait arrêter de se cacher derrière une solution de pure forme, en pensant que les abonnements aléatoires sont la solution à tous les problèmes. C’est faux ! Nous n’avons pas exigé un simple retour en arrière, nous avons au contraire demandé à travailler sur le fond.

Quelles suites allez-vous donner à ces propositions ?
Aujourd’hui nous ne proposons rien au club, puisque de toutes façons ils ne nous écoutent même pas. Nous allons voir comment la situation évolue. Une chose est sûre, nous continuerons à montrer notre désaccord avec cette politique anti-ultras parisiens organisée par le club et les pouvoirs publics. Ce que nous demandons, c’est un vrai geste de la part du PSG. Mais peut-être les choses vont-elles changer avec le rachat du club…

La contestation et les mensonges de Leproux

Deux actions de protestation sont prévues contre Monaco, en tribune H par les ex-Lutece Falco et en tribune J par les anciens de Boulogne. Vous êtes vous concertés ?
Bien sûr. Liberté pour les abonnés a appelé à y participer, que ce soit en H ou en J. Toutes ces actions sont organisées en commun, nous restons en contact permanent avec les différentes entités qui se mobilisent.

Beaucoup de ceux qui continuent de se rendre au Parc des Princes cette saison ne comprennent pas que vous appeliez à y aller face à Monaco après avoir prôné le boycott toute la saison.
Nous retournons certes au Parc des Princes, mais pas dans le même esprit, et nous n’irons pas en virages — nous refusons d’acheter des places Tous PSG. Nous cassons seulement le boycott le temps d’un match, parce qu’il est symbolique à plusieurs titres : c’est celui qui suit la décision du club, et c’est le dernier match de l’année 2010 au Parc. Il s’agit de montrer au public qu’avec nous, le stade ressemble à autre chose. Mais dès la fin de la rencontre, nous reprenons le boycott.

Un autre reproche adressé aux partisans du boycott tient aux insultes à l’égard de ceux qui prennent place en virages cette saison.
Nous ne pouvons pas gérer tout le monde. Nous, nous sommes contre la direction, pas contre les supporters parisiens. Le but n’est pas d’insulter le Parc des Princes, mais de chanter pour le club et contre la direction. L’ambiance sera la même qu’en déplacement : nous y allons pour encourager le PSG et contester le plan Leproux.

« À Lviv, Leproux a présenté les supporters parisiens comme des néo-nazis aux dirigeants locaux pour que l’accès au stade leur soit refusé »

Avez-vous eu des retours de la part du PSG à l’approche du match ?
Robin Leproux m’a appelé jeudi pour me dire qu’il fallait que l’on appelle au calme. Évidemment que nous appelons tout le monde à rester pacifique ! Comme toutes nos actions depuis le début de la saison, celle-ci sera revendicatrice mais non-violente (voir plus bas le communiqué de LPA). Mais j’ai clairement dit à Robin Leproux que s’il y avait des incidents, ce serait à cause du comportement de la direction vis-à-vis de ses supporters historiques, qui continue de faire l’amalgame et refuse de nous écouter. Ce mépris à notre égard peut créer une radicalisation chez certaines personnes. Mais encore une fois, cela ne serait pas du tout de notre responsabilité. C’est beaucoup trop facile ! Je l’ai dit à Leproux : « Nous sommes prêts à appeler au calme de notre côté, mais il faut que vous aussi fassiez votre boulot auprès des pouvoirs publics. »

La pression des pouvoirs publics s’est-elle relâchée en déplacement ?
Au contraire… À Valenciennes, nous étions environ 400 Parisiens à avoir fait le déplacement, toutes tribunes confondues — il y avait des anciens d’Auteuil, de Boulogne, la Brigade Paris et les ex-Lutece Falco. Le parcage étant réservé aux quelques dizaines de personnes qui achètent le package transport+place auprès du PSG, nous avons pris des billets de l’autre côté du stade, parmi les Valenciennois. Il n’y a eu aucun incident, comme depuis le début de la saison, mais les CRS n’ont pas manqué de nous provoquer : en fin de première période, ils sont rentrés en tribune pour nous encadrer, mais en tenue anti-émeutes, matraque à la main, et en poussant. C’est inadmissible, parce que tout se passait bien — et tout s’est bien passé, car personne n’a répondu à leurs provocations.

Y avait-il eu des incidents en tribune avant l’arrivée des CRS ?
Non, ils sont vraiment arrivés sans aucune raison. Nous étions simplement en train de chanter… Mais Robin Leproux m’a clairement dit que de toute manière c’était la dernière fois que cela se passait comme ça, que les pouvoirs publics avaient pris cela comme un échec que l’on se rassemble dans la mesure où un arrêté avait été contourné. Nous avions tous des billets, mais il m’a indiqué qu’un autre arrêté avait été pris, qui interdisait tout regroupement de supporters parisiens ! On se rend compte que Leproux veut éliminer totalement le mouvement ultra, que ce soit au Parc ou à l’extérieur, malgré le fait que cela se passe très bien puisque depuis le début de la saison il y a des supporters parisiens en déplacement — notamment à Toulouse ou Valenciennes —, Auteuil et Boulogne mélangés — même avec les supporters adverses puisque nous n’avons pas accès au parcage parisien —, et il n’y a jamais eu d’incident.

Avez-vous d’autres exemples de mesures visant à empêcher le déplacement des supporters parisiens ?
Mercredi, un petit groupe d’anciens Lutece Falco est allé à Lviv. La direction du PSG était au courant de leur arrivée, elle a fait passer un message auprès des dirigeants locaux en disant : « Il y a un groupe néo-nazi violent qui vient, il ne faut pas les laisser rentrer ». Ils se sont fait refuser l’accès au parcage visiteur, et ont dû se débrouiller avec leurs contacts sur place pour pouvoir rentrer en tribune ! À quoi joue Robin Leproux ? Pourquoi passe-t-il sous silence nos propositions, et le fait que tout se passe bien à l’extérieur quand nous sommes tous ensemble ? Pourquoi nous refuser l’accès aux tribunes en nous faisant passer pour des néo-nazis ? En début de saison déjà, Leproux déclarait qu’il n’y avait pas de femme ni d’enfant dans les tribunes la saison dernière : c’est totalement faux. Pourquoi de tels mensonges ? Au moins, Alain Cayzac sait de quoi il parle, et il n’a pas de mépris pour les supporters parisiens…

Derniers échos avant PSG-Monaco

Comme nous l’indiquait Jérémy durant l’interview, réalisée vendredi soir, Liberté pour les abonnés a diffusé un communiqué rappelant que l’association prône une action non-violente, comme l’étaient toutes celles organisées depuis le début de la saison.

Communiqué de Liberté pour les abonnés

Samedi, le Parisien annonce que les supporters qui insulteront Robin Leproux ce soir lors du match PSG-Monaco seront interpellés. « La préfecture de police de Paris est prête, comme lors de la première journée de L1 pour la venue de Saint-Étienne, à dégainer en nombre des interdictions administratives de stade  », se réjouit le quotidien.

[1] « Les tribunes en bleu pouvaient accueillir l’ensemble des anciens abonnés — des niveaux rouge ET bleu, expliquent les ex-Lutece Falco. Chaque année, 30 % des personnes de ces tribunes ne se réabonnent pas, ce qui correspondait à la population des tribunes rouge. Tous les anciens abonnés auraient été évidemment prioritaires pour l’achat de ces abonnements. En fin de saison, chacun serait ensuite libre de s’abonner où bon lui semblait.  »