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Borussia-PSG : après Séville, envahir Dortmund
Récit du déplacement non-officiel à Séville
À Séville, les supporters parisiens furent accueillis par la police française
mercredi, 6 octobre 2010, par Vivien B.

Fin septembre, nous avions recueilli le témoignage de deux supporters partis à Séville dans le cadre du déplacement officiel organisé par le club, qui réunissait une vingtaine de personnes. Plusieurs centaines de supporters du PSG s’étaient par ailleurs déplacés à Séville par leurs propres moyens. Nous avons demandé à l’un d’entre eux de nous raconter les dispositions prises par les pouvoirs publics français pour les empêcher de se rendre au stade.

Le 7 août dernier, plusieurs centaines de supporters parisiens s’étaient réunis pour protester contre la suppression des abonnements dans les tribunes populaires du Parc des Princes. Bilan : 250 interpellations et autant d’interdictions de stade, malgré des manifestations pacifiques.

Depuis, la lutte contre le plan Leproux a pris plusieurs formes : le boycott des matches — à domicile comme en déplacement — pour la majorité des 13 000 anciens abonnés, mais aussi quelques chants ou banderoles de contestation dans l’enceinte des stades. Jusqu’à la semaine dernière, des arrêtés préfectoraux interdisaient aux supporters parisiens d’assister aux matches du PSG en déplacement sur le territoire national. Les rencontres de coupe d’Europe constituaient donc le seul moyen de suivre le PSG à l’extérieur sans acheter un package transport+place auprès du club.

À Séville, interdiction (verbale) d’aller au stade

À l’occasion du match Séville-PSG, le 16 septembre dernier, quelques centaines de supporters parisiens ont donc acheté leurs places sur Internet avant de se déplacer par leurs propres moyens. Mais là encore, les pouvoirs publics français sont intervenus aveuglément, et l’essentiel des Parisiens ayant fait le déplacement ont été empêchés de se rendre au stade. Après en avoir interrogé plusieurs d’entre eux, nous publions le témoignage d’Alain.

Je m’appelle Alain, j’ai 22 ans. J’étais abonné depuis huit ans au Parc des Princes, en virage ou en quart de virage. Je n’ai assisté à aucun match cette saison.

Je suis allé à Séville par mes propres moyens — parce que je ne cautionne pas le plan Leproux et les déplacements organisés par le club —, avec deux amis qui ont le même profil que moi. Arrivés à l’aéroport de Séville jeudi à 13h30, nous avons été accueillis par deux RG français et la police espagnole, dont plusieurs gradés. Ils ont arrêté tous les individus sortant de l’avion susceptibles d’être des supporters parisiens. Il serait peu étonnant qu’ils aient eu accès à la liste des personnes sur le vol, leur permettant de faire une pré-liste. Par un ami présent sur place, j’avais appris que quelque chose de similaire avait eu lieu la veille au soir dans le vol en provenance de Paris.

Les RG français nous ont demandé d’attendre sur le coté, le temps de réunir tout le monde, en nous expliquant qu’en aucun cas nous n’aurons accès au stade, qu’ici c’est l’Espagne et que contrairement à ce qui se passe France, eux ne rigolent pas. Nous avons ensuite été fichés un par un : les policiers espagnols ont fait des photocopies de nos cartes d’identité, ils nous ont photographiés, fouillés — certains ont même dû enlever leurs chaussures —, et enfin ils ont pris l’adresse de nos hébergements et l’horaire du vol retour. Selon eux, nos noms et photos étaient destinés à être communiqués aux guichets du stade et aux forces de l’ordre. Le représentant de l’autorité espagnole parlant français, il m’a expliqué que le PSG a décidé de ne s’occuper que des supporters parisiens en parcage, auquel nous ne pouvions donc pas accéder : « Il faut voir cela avec votre club. » Autrement dit, les autorités espagnoles, en concertation avec les autorités françaises et le PSG, ont pris la décision de ficher les gens et d’interdire l’accès aux abords du stade sous peine de sanction. Ils nous ont assuré que c’était bien légal… Je leur ai demandé de pouvoir consulter l’arrêté stipulant ces informations, ils m’ont répondu de me rendre à la préfecture de Séville.

Quand ils m’ont pris en photo, je leur ai demandé : « Sans mon accord ? » Les RG français sont intervenus : « Ferme ta gueule et nous fais pas chier avec tes questions, ils n’ont pas à se justifier. Tu la fermes ! » Les RG m’ont ensuite demandé quelle était ma tribune. Comme mes amis, passés avant moi, j’ai répondu : « Neutre. » Le RG m’a relancé : « Tu réponds à la question mon grand. On vous connait, on est au Parc. Ou sinon je te mets IDS à ton retour en France… » Je leur ai donc indiqué mon ex-tribune. Ils ont fini par me rendre ma carte d’identité, en me disant : « Ici c’est la police espagnole. En ville, ce seront les CRS… Eux ne rigoleront pas ! » Selon eux, si nous sommes trop nombreux dans un bar pour voir le match, nous nous ferons déloger. En sortant de la salle, un RG me lâche un « Bonne soirée » très ironique…

Avec mes deux amis, nous avons passé l’après-midi à tenter de prendre connaissance de ce fameux texte à la préfecture de Séville. Personne n’était au courant. Finalement ils nous ont dirigés vers la police espagnole, dans une sorte de commissariat pas très loin du stade. Nous y avons accédé en contournant le stade le plus discrètement possible. Nous avons de nouveau expliqué notre problème et, là encore, personne n’était au courant. Après avoir vérifié nos identités, le policier nous a dit : « No criminal, no terrorist, why can’t you go to the stadium ? » Lorsque nous lui avons expliqué, il n’en est pas revenu… Vers 19h30, il nous a dit d’aller au stade et de retirer les places que nous avions pré-commandées sur Internet. Il nous a donné son numéro et celui du consulat français en cas de problème. Globalement, hormis à l’aéroport, les policiers espagnols ont d’ailleurs tous été très sympas, très patients pour nous comprendre malgré la barrière de la langue — nous communiquions dans un mélange d’anglais, d’espagnol et de français… Surtout, ils ont tous été stupéfaits quand nous leur avons expliqué qu’on nous interdisait l’accès au stade.

Nous avons donc contourné le stade en prenant soin de passer dans les zones les moins fournies en CRS. Malgré la présentation de nos cartes d’identité, nous avons retiré les places sans problème, contrairement à ce qui nous avait été affirmé à l’aéroport… Nous sommes finalement rentrés dans le stade sans difficulté — sans même être fouillés ! Je ne pense pas que plus de 20 ou 30 Parisiens soient rentrés en tribunes. D’après les échos que j’ai eus, la majorité ont abandonné l’idée à cause du fichage ou se sont faits parquer aux abords du stade pendant deux heures malgré leurs places pour le match.

Lors de notre retour à Paris, nous avons constaté la présence de deux RG et d’une quinzaine de policiers à la sortie de l’avion, mais ils ne sont pas venus vers nous. Une interdiction de stade ? Cela serait encore plus absurde que ce qui s’est passé en marge de PSG-Saint-Étienne, déjà invraisemblable. Et je pense que nous aurions déjà eu des nouvelles… J’ai l’intention d’aller à Dortmund pour le prochain déplacement européen du PSG. En revanche, je ne retournerai pas au Parc tant que ce plan sera en place, pour les raisons qu’a très bien résumées l’association Liberté pour les abonnés : la mise à l’écart de 13 000 abonnés, la hausse des tarifs, les amalgames et la stigmatisation, le placement aléatoire…

Avant le match, l’association Liberté pour les abonnés avait diffusé un communiqué de presse pour dénoncer les propos du commissaire à la tête de la Division nationale de lutte contre le hooliganisme, qui déclarait sur RMC : « Je mets en garde très fortement les personnes qui font l’objet d’une interdiction de stade et qui auraient l’intention d’embarquer et d’aller à Séville. Je conseille très vivement à ces personnes d’aller directement se faire connaître dans leur commissariat habituel parce que s’il y a des problèmes ça leur permettra de démontrer qu’elles étaient sur le territoire national. » « Nous dénonçons ces tentatives d’entrave à la liberté de circulation qui bafouent les droits les plus fondamentaux des supporters parisiens, indiquait le communiqué de l’association diffusé aux principaux médias français. […] Les interdictions de stade ne sont valables que sur le territoire français. Il n’y a donc pas lieu pour les personnes visées de pointer au commissariat lors d’un match se déroulant hors du territoire français. […] Nous rappelons, par ailleurs, que tout citoyen est présumé innocent jusqu’à preuve du contraire. » Finalement, même les Parisiens qui n’étaient pas interdits de stade ont été empêchés d’assister au match Séville-PSG.

À Dortmund, jeudi 21 octobre : « envahir le stade ! »

Un communiqué du Virage Auteuil et de la tribune G a été diffusé en début de semaine. Il appelle à poursuivre le boycott des matches du PSG au Parc des Princes et des déplacements officiels encadrés par le club. Par ailleurs, il invite à un déplacement massif en Allemagne jeudi 21 octobre prochain pour le match du PSG sur le terrain du Borussia Dortmund :

La voie que nous avons adoptée, c’est-à-dire celle du boycott général des rencontres du Paris Saint-Germain, est un premier franc succès dans la longue reconquête de nos travées désertées. […]

Nous appelons tous les anciens pensionnaires du Virage Auteuil et de la tribune G à se rendre à Dortmund par leurs propres moyens pour envahir les tribunes du Westfalenstadion dans le but de crier haut et fort leur refus du plan Leproux.

Communiqué Virage Auteuil — tribune G (Dortmund)