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Zoom rétro n°9 : Toulouse-PSG 2007/2008

Le langage fleuri et le folklore de TFC-PSG

À Toulouse c’est différent, « c’est une terre de rugby »

dimanche 18 octobre 2009, par Gauthier B.

Le langage fleuri et le folklore de TFC-PSG

Actuellement, le TFC et le PSG jouent pour une qualification en coupe d’Europe. Il y a deux saisons, ces équipes partageaient également le même objectif. Sauf que cette fois-ci, leur lutte concernait le maintien. À trois journées de la fin de l’exercice 2007/2008, le PSG se déplaçait au Stadium de Toulouse, et la tension était très importante… surtout du côté toulousain.

Olivier Sadran, qui a pris le président de l’Olympique Lyonnais pour modèle, est parfois surnommé « le petit Aulas ». Illustration avec le Toulouse-PSG de mai 2008.

Étape 1 : l’avant-match médiatique

Durant la semaine précédant cette rencontre, divers salariés du TFC ont en effet tenu des propos plus que surprenants envers le PSG, puisant allègrement dans la répartie du petit club lésé face aux institutions de la capitale. À commencer un joueur toulousain de l’époque, Nicolas Dieuze, qui à la sortie d’un match perdu — une semaine avant la rencontre face au PSG —, évacue sa frustration en mettant tout sur le dos… des Rouge et Bleu. Le tout empli de poésie [1] :

Nan, toujours la… toujours la polémique, toujours ! Franchement, les arbitres euh… On a compris, bon, euh… SOS Paris Saint-Germain partout… Si on a envie d’aider le Paris Saint-Germain, on les laisse en Ligue 1, nous on reste là où on est, et puis comme ça tout le monde sera content ! Euh, les radios, SOS Paris Saint-Germain et tout, moi j’en ai plein le cul, quoi ! Pourquoi nous on n’aurait pas le droit de rester en Ligue 1 ? Faut arrêter ! […] L’arbitre siffle la fin du match sur le corner, ça va quoi !

À l’époque et encore maintenant, personne ne comprend réellement comment on peut faire le lien entre une fin de match sifflée sur un corner et le PSG. Quant au fameux SOS PSG, Dieuze aurait juste dû arrêter d’écouter RMC, ou tout du moins éviter de croire qu’une opération visant à rameuter les auditeurs puisse avoir une influence sur les arbitres de la LFP, et surtout en faveur du PSG. C’est finalement tout le complexe provincial qui ressort : les radios, et le siège de la Ligue sont à Paris, donc ils favorisent le PSG… La pertinence de ce raisonnement ne cessera jamais d’impressionner.

Mais son président, Olivier Sadran, n’est pas en reste. Quelques jours avant la rencontre, il fait encore plus monter la pression [2] :

De façon anecdotique, j’ai vu dans des journaux parisiens que Paris voulait recruter par hasard Emana et Elmander. Je peux vous dire qu’Emana et Elmander, un jour, ne seront plus à Toulouse peut-être, mais, moi vivant, ils ne seront jamais à Paris. […]

On a reçu Nice, Saint-Étienne, Marseille, tout s’est toujours bien passé et tout se passera bien pour Paris parce que j’espère que les Parisiens sont des gens responsables et, si ça ne se passe pas bien, il faudra se poser des questions. […]

Je n’ai aucune crainte de l’arbitrage car les arbitres, et je dis bien les trois arbitres, sont les garants de l’équité sportive. Sincèrement, si j’avais un instant un doute sur l’arbitrage, je vous rends les clefs immédiatement car cela voudrait dire que nous sommes rentrés dans un cercle vicieux terrible. […]

Continuons à préserver cette équité et ne montons pas en mayonnaise des choses qui n’ont pas lieu d’être.

L’élève de Jean-Michel Aulas joue lui aussi sur la fibre provinciale pour galvaniser ses troupes. Les quotidiens nationaux deviennent des journaux parisiens. Et surtout, il s’excite sur des rumeurs vieilles comme le monde, qui ne sont pas réellement fondées. N’importe quel observateur du football sait très bien qu’à l’approche des divers mercatos, les agents font circuler des bruits pour faire monter la cote de leur poulain. Et les journalistes n’en demandent pas tant pour remplir leurs pages d’informations invérifiables. Ainsi, malgré les affirmations de Sadran, il n’est même pas acquis que ces joueurs aient été approchés par un quelconque membre du PSG. Cela s’apparente surtout à des rumeurs sorties à chaque mercato : Emana par exemple était annoncé au PSG depuis l’été… 2004. En fait, rien de vraiment neuf sur lequel s’égosiller.

Pourtant, Sadran parle, met tout une pression malsaine à l’arbitre et, surtout, évoque des incidents à venir d’une façon bien mystérieuse. Les propos du président et de son joueur son relayés sans aucun problème par toute sorte de médias qui ne trouvent rien à y redire. D’autant qu’à l’époque, nous sommes en pleine affaire de la banderole : taper sur le PSG est un sport national. Il est à noter que pendant ce temps, les Parisiens de Paul Le Guen n’ont absolument pas réagi à ces propos un tantinet déplacés [3].

Étape 2 : sur le terrain et dans les vestiaires

Au moment de la rencontre, il apparaît d’emblée que les Toulousains sont surmotivés, et souvent à la limite du raisonnable. Les incidents se succèdent. Les premières minutes voient les défenseurs tacler durement, à tour de rôle, Pauleta. À la mi-temps, l’entraîneur adjoint Alain Casanova [4] aurait adressé une claque à Mario Yepes, et Salim Arrache, pourtant remplaçant, aurait pénétré dans le vestiaire des arbitres à la mi-temps pour reprocher aux officiels de ne pas avoir sifflé un penalty [5]. D’après L’Équipe, plusieurs membres du club parisien disent également avoir vu Sadran, « ulcéré », interpeller Fredy Fautrel : « Vous voulez favoriser le PSG ! » Sur ce, les Parisiens finissent par tomber dans le trop gros panneau et tentent d’empêcher les Toulousains d’influencer l’arbitre, entraînant encore plus d’échauffourées.

Il est à noter que Michel Moulin officiait à l’époque au PSG. Récemment, lors de 100 % Foot, le patron du 10 Sport s’en était pris à Robin Leproux qui ne savait pas empêcher un adversaire d’aller influencer l’arbitre à la mi-temps. Visiblement, lui n’en était pas capable non plus…

Mais revenons au match. En seconde période, Bernard Mendy ouvre le score. Échaudé par les incidents, il fête sa joie en adressant un regard vengeur vers le banc toulousain. L’arbitre du match, Freddy Fautrel, fait alors preuve d’une très grande complaisance envers les locaux, en refusant systématiquement de sanctionner les agressions, et Toulouse finit par égaliser par Fofana. Et là, l’impensable se produit : Alain Casanova, au lieu de légitimement fêter sa joie avec ses collègues, effectue une course de 50 mètres pour aller insulter Bernard Mendy. L’éducateur est tout de même expulsé par l’arbitre, et le match s’achève dans la cohue, sur un match nul.

Dans la presse, ces incidents côté toulousain passeront pour du folklore, on parlera de langage fleuri pour Casanova : à l’heure où les récents propos de Kombouaré ont été qualifiés de grossiers et d’agressifs, ceci laisse rêveur. Et les Toulousains se dédouanent eux-mêmes en minimisant complètement les faits. Voici un pot-pourri des déclarations toulousaines :

Les gens vivent leurs émotions, voilà tout. (Casanova) — Ça fait partie du folklore. (Battles) — Je n’ai rien vu mais bon, des gamineries… des balbutiements, par la faute de la chaleur. (Baup) — Vous voulez parler de ces toutes petites échauffourées ? Ce n’est rien du tout. C’est le sport, c’est le genre de choses qui arrive dans ces moments-là. Nous sommes dans une terre de rugby, ici, je pense vraiment que ce n’est rien du tout. (Sadran)

Et bien sûr, cela fonctionne. Point d’éditorialiste pour s’offusquer des comportements pyromanes et hypocrites de tous ces gens, il faudra lire les entrefilets pour apprendre que Casanova sera suspendu deux matches. Pire encore, le seul qui sera mis publiquement au ban est le seul salarié du PSG qui aura osé se plaindre de tous ces incidents. Grégory Bourillon osera se plaindre en interview d’après-match de l’arbitrage partial en fin de rencontre, et de la pression mise sur l’arbitre par les Toulousains [6]. Des articles dans L’Équipe et surtout dans Libération affirmeront sans vergogne que le joueur parisien est de mauvaise foi. Certains parleront même de « paranoïa »… [7]

Quoi qu’il en soit, quand on déroule les propos d’avant-match — dans lesquels les Toulousains ont exercé une grosse pression sur l’arbitrage, et ont prophétisé des incidents —, le déroulement de la rencontre — riche en coups bas et insultes — et ce qui s’est dit ensuite — une volonté commune de tous les protagonistes du TFC d’étouffer l’affaire —, il n’y a pas un grand effort intellectuel à fournir pour voir qu’il s’agissait d’un traquenard dûment préparé. Le Parisien résumait le match en expliquant le lendemain que « le groupe de Paul Le Guen est tombé dans le piège toulousain, fait de provocation, d’intox et de petites phrases ». Heureusement, les deux équipes se sont maintenues [8], et cette rencontre n’a finalement eu que peu d’incidence.

Le plus dommageable reste encore la frustration que tout Parisien peut ressentir. Sans vouloir se victimiser à outrance, il est clair que de tels incidents auraient fait beaucoup plus de bruit si les fautifs avaient été Parisiens. Le passé du PSG est jalonné de comportements, pourtant bien moins expansifs, qui ont valu des commentaires acerbes et des sanctions exemplaires — jusqu’à six mois de suspension —, qu’il s’agisse d’Halilhodzic ou de Fernandez par exemple. Alors quand un Casanova se permet d’agresser, d’influencer et d’insulter à tour de bras, et que l’on met tout ça sur le compte du soleil, il y a décidément de quoi dire que le PSG n’est pas logé à la même enseigne que les autres clubs.

Notes

[1] Source : Les Cahiers du Football.

[2] Source : sport.fr.

[3] Ce qui n’empêchera pas le Parisien d’affirmer, au lendemain du match : « Hier, après une semaine passée à se répondre par voie de presse, les tensions étaient si vives entre les deux clubs que la rencontre a manqué de virer au pugilat après l’égalisation toulousaine. »

[4] Devenu depuis entraîneur principal du TFC.

[5] Une supposée faute sur Fodé Mansaré, qui a concédé par la suite qu’elle n’avait rien d’évident.

[6] Grégory Bourillon a notamment expliqué : « Franchement, on n’est pas aidés par l’arbitrage. Jusqu’à notre but, il n’y avait pas de problème, mais dès qu’on a marqué, l’arbitre n’a plus sifflé une faute en notre faveur. Il ne sifflait plus que contre nous. Dans le vestiaire, on s’est posé pas mal de questions. C’est sûr que les déclarations des Toulousains cette semaine ne nous ont pas aidés. Après ce qu’on a vu ce soir, que les autres arrêtent de se plaindre. Car Paris n’est vraiment pas aidé. »

Sylvain Armand avait également réagi : « Tu t’aperçois que quand une équipe s’apprête à jouer Paris, tout le monde se ligue contre le PSG. Cette semaine, il y a eu Antonetti [entraîneur de Nice], puis Dieuze. De toute façon, il y a toujours quelqu’un pour dire qu’on est avantagés. Mais est-ce que quelqu’un trouve anormal qu’à partir du moment où on est menés, l’arbitre ne siffle plus pour nous ? Si toutes les équipes agissent ainsi avant un match contre Paris et que ça donne le même résultat, ça va devenir un sérieux handicap. Ça ne peut pas continuer comme ça. »

[7] Dans L’Équipe, Damien Degorre et Jérôme Touboul écriront à propos des réactions de Michel Moulin que « le procédé utilisé » par le conseiller sportif du PSG « est assez classique : chercher à unir le groupe face aux “agressions” supposées du monde extérieur. »

De son côté, Grégory Schneider sera égal à lui-même — pathétique, donc — dans le journal Libération : « [Après les déclarations de Bourillon] On est resté comme deux ronds de flanc. Sauf le respect que l’on doit au vestiaire parisien, l’arbitrage de Fredy Fautrel fut parfait. Interrogés sur le sujet, les défenseurs toulousains Dominique Arribagé et Mohamed Fofana ont affiché des mines sidérées. […] Alors que la France entière bruisse d’un vaste complot économico-politico-médiatique visant à maintenir le PSG parmi l’élite, Bourillon raconte un groupe complètement autarcique, paranoïaque, abandonné des dieux. »

[8] Au détriment de Lens.

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