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Zoom rétro n°3 : Valenciennes-PSG 2007

Quand le PSG devient un club formateur

Retour sur un Valenciennes-PSG très inhabituel

samedi 22 août 2009, par Gauthier B.

Quand le PSG devient un club formateur

Les liens entre Valenciennes et le PSG sont multiples. Des entraîneurs emblématiques — Georges Peyroche, le coach des premiers titres parisiens et Antoine Kombouaré, l’entraîneur actuel — aux joueurs un peu moins illustres — Laurent Leroy et Rudy Haddad — en passant par des matches-clés — la montée du PSG en première division en 1974. Mais de tout ça, il n’est pas question aujourd’hui : pour ce zoom rétro, nous allons revenir à un passé beaucoup plus proche.

Précisément, nous sommes en octobre 2007. Alain Cayzac est encore le président-directeur général du club, et Paul Le Guen son entraîneur incontesté. Sportivement, la situation est délicate : à l’aube de la 11e journée, le PSG est quatorzième du championnat. Avec à son compteur trois maigres victoires, mais aucune au Parc des Princes.

La honte d’Alain Cayzac après PSG 1-3 Rennes

Surtout, la dernière rencontre a été vécue comme une humiliation par les supporters du PSG : lors de la venue de Rennes, le club francilien s’est incliné 1-3. Pire encore, ce match était censé être un hommage à Francis Borelli, ancien président historique du club, décédé quelques jours auparavant. Les joueurs n’avaient pas été à la hauteur de l’événement, et s’étaient faits clairement malmener durant la rencontre.

Alain Cayzac avait été particulièrement agacé par le non-match des siens. Aussi, juste avant le déplacement à Valenciennes qui allait suivre s’est-il fendu d’un discours très vindicatif auprès de ses troupes. Ce discours est intégralement retranscrit dans son livre, Passion Impossible. Pour resituer l’ambiance qui règne au PSG à cette période, en voici un extrait :

Cela fait quinze jours que je n’arrive pas à évacuer la déception que m’a procurée la défaite contre Rennes. Je ressasse mon amertume. J’ai longtemps cherché le mot qui traduisait le mieux mon mal-être : ce mot, c’est la honte. Je n’attends qu’une chose : le rachat pour pouvoir renouer avec l’optimisme. Quand on a un gros coup de ras-le-bol comme celui-là, on a deux attitudes possibles : laisse tomber ou se révolter. Eh bien j’ai choisi de me révolter, mais pas seul, avec vous si vous le voulez. La remise en cause doit être celle de tous. Totale. J’ai honte parce que cela fait seize mois exactement que j’ai le sentiment de tout faire pour que ça marche et ça ne marche toujours pas. Soit c’est ma seule faute, soit elle est partagée, ce que je pense, et là, il faut s’expliquer. J’ai honte parce qu’on a frôlé la catastrophe l’an dernier et que cette année encore on y court tout droit si on ne réagit pas. Le club ne se remettrait pas d’une deuxième année horrible. Moi non plus. Mais ça vous devez vous en foutre, car aujourd’hui, la seule chose qui compte, c’est le club. J’ai honte parce que je suis responsable — et vous avec — du bonheur et du malheur de trois millions et demi de sympathisants, et aujourd’hui, ils sont horriblement déçus. J’ai honte quand je pense à Francis Borelli. J’ai honte parce que j’ai le sentiment d’un immense gâchis. Un public en or, un club prestigieux, un club qui a fait ses preuves, un stade magnifique, un des plus gros budgets de L1, des joueurs de talent… Je vous demande une totale remise en cause. […]

Entre le match de Rennes et le déplacement à Valenciennes a eu lieu une trêve internationale. Le temps de ruminer ce camouflet, mais aussi le temps pour Paul Le Guen de bien réfléchir à la suite des événements. Pas vraiment satisfait de ses joueurs, de certaines de ses recrues auxquelles il a attribué une grande confiance [1], Le Guen va modifier son équipe de départ dans des proportions rarement atteintes.

Paul Le Guen chamboule son équipe-type

Des équipes de joueurs chevronnés et starifiés qui patinent complètement en championnat, le PSG en a vues. Et combien de fois la remarque consistant à dire que le résultat n’aurait pas été pire si l’on avait fait jouer les jeunes de CFA à leur place a-t-elle été entendue aux abords du Parc des Princes ? Le Guen a dû se faire la même réflexion et, riche d’une génération de joueurs très ambitieuse, qui avait déjà fait bonne impression en amical [2], il réalise alors purement et simplement le fantasme de certains supporters parisiens. Exit donc Armand, Bourillon, Digard, Luyindula, Rothen et Pauleta. Le Guen réintègre Yepes à son onze de départ [3], maintient sa confiance envers les rares joueurs satisfaisants du club [4] mais surtout, titularise tous ensemble les très jeunes Granddi Ngoyi (19 ans), Younousse Sankharé (18 ans), Loris Arnaud (20 ans), David Ngog (18 ans) et Mamadou Sakho (17 ans). Avec en prime pour ce dernier le brassard de capitaine, alors qu’il n’a que 17 ans et 8 mois.

Sakho devient ainsi le plus jeune capitaine de l’histoire de la première division française, et le signal envoyé par Paul Le Guen est très fort : si d’aventure les joueurs professionnels ne travaillent pas assez bien à son goût, la relève est déjà là.

Cette équipe inédite se procure un bon résultat, un 0-0 qui n’aurait certainement pas été bien perçu s’il avait été obtenu par les titulaires habituels. Mais l’équipe parisienne s’est montrée sérieuse et appliquée. Les jeunes n’ont pas eu froid aux yeux, Sankharé n’a pas hésité à tenter des gestes techniques culottés, dont sa fameuse virgule, et finalement le PSG ne doit renoncer aux trois points qu’en raison de la maladresse d’Amara Diané, qui manque plusieurs face à face.

Le coup a plutôt bien fonctionné sur ce match. Sans que Cayzac ne soit vraiment d’accord, Le Guen reconduira cette équipe la semaine suivante face à Lyon, pour une défaite 2-3. Mais progressivement, ces jeunes joueurs sortiront de l’équipe titulaire, laissant place à l’expérience nécessaire pour l’urgente lutte contre la relégation. À court terme, ce choix courageux de Le Guen n’a effectivement pas rapporté les résultats escomptés. Les jeunes n’ont pas su être efficaces sur la durée, et l’orgueil des plus vieux n’a visiblement pas été suffisamment atteint pour que les résultats se rehaussent immédiatement.

Bilan, deux ans plus tard

Et deux ans après, il est également cruel de constater que ces jeunes si prometteurs n’ont pas été tous très heureux dans la suite de leur carrière. À l’exception notable de Sakho, devenu titulaire indiscuté de la défense parisienne [5] tous ont en effet stagné depuis :

- David Ngog n’a jamais confirmé les espoirs placés en lui, et n’a visiblement pas supporté la concurrence parisienne, tant sa nonchalance lors de ses dernières apparitions parisiennes était flagrante. Il a été vendu pour un bon prix à Liverpool — deux millions d’euros —, qui ne le fait jouer qu’épisodiquement, et qui songerait désormais à le prêter en D2 anglaise.

- Loris Arnaud a vu sa deuxième année professionnelle complètement tronquée par une grave blessure contractée lors d’un match de coupe d’Europe. Il est depuis revenu, sans que Kombouaré ne l’appelle pour l’instant dans son groupe. Se blesser à cet âge pardonne rarement — un autre ex-espoir du PSG, Samuel Piètre, peut en témoigner.

- Younousse Sankharé n’a jamais réussi à s’imposer au PSG, ni à gauche, ni dans l’axe, malgré quelques tentatives de Paul Le Guen. Il a fini prêté l’an dernier à Reims (L2), où il n’a pu empêcher la relégation du club en National. Tout en laissant une impression assez mitigée aux observateurs rémois, considérant que le joueur ne faisait pas tous les efforts nécessaires.

- Enfin Granddi Ngoyi n’a presque pas joué au PSG l’an dernier. Il a trouvé son salut en étant prêté à Clermont (L2), où il a fait très forte impression. Aujourd’hui, il semble plaire à Kombouaré et tape à nouveau à la porte de l’équipe titulaire parisienne. Mais il lui aura fallu presque deux ans pour revenir dans les plans de l’entraîneur.

Ces jeunes sont donc loin d’avoir le parcours fulgurant que leurs débuts précoces auraient pu laisser entrevoir. Faut-il pour autant considérer que le choix de Le Guen lors de ce Valenciennes-PSG était un coup dans l’eau ? Probablement pas.

Cette décision a définitivement validé la politique voulue par Colony Capital et déjà amorcée par Guy Lacombe, à savoir que le PSG devait composer son effectif avec un tiers de joueurs formés au club. Depuis ce match, les mentalités concernant les jeunes joueurs ont changé. Alors que le PSG a longtemps été considéré comme un club où il était difficile d’émerger, donc un choix de carrière risqué, le message lancé à tous les footballeurs en devenir indique que le club de la capitale peut désormais laisser leur chance à ses jeunes. Sur les trois dernières années, plus d’une dizaine de pros ont été lancés dans le grand bain, et le PSG a généralisé sa politique de premiers contrats professionnels — cet été plusieurs joueurs ont signé ce fameux contrat avant même d’avoir évolué avec l’équipe A [6].

Il est difficile d’en estimer les conséquences réelles, mais à long terme, il est fort probable qu’au moment d’hésiter entre plusieurs clubs, un jeune pourra désormais prendre en compte que le PSG a accentué l’importance de sa formation ces dernières années. Ce Valenciennes-PSG en est le signal fort. Ironie du sort, cette décision prise par Le Guen pour piquer dans le vif, et dans l’immédiat, l’égo de ses joueurs cadres, a finalement de grandes chances de finir par présenter des conséquences très avantageuses d’ici quelques années.

Notes

[1] On pense à Bourillon et Digard, titularisés dès leur arrivée et avec insistance.

[2] Notamment lors de la première édition de l’Emirates Cup.

[3] Yepes n’avait quasiment pas joué depuis l’arrivée de Bourillon.

[4] Landreau, Camara, Cearà qui venait alors d’arriver, Clément et Diané.

[5] À tel point que le recrutement de Gabriel Heinze a été jugé superflu du fait de sa présence.

[6] Areola, Barrada, Kamghain et També.

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1 commentaire a déjà été posté par nos lecteurs

  • #1

    Arno P-E
    22 août 2009 15:59

    Intéressante la mise en perspective de la destinée de ces joueurs ayant été titularisé à moins de 20 ans contre Valenciennes.

    Je me souviens des attentes et des espoirs que le tournoi de l’Emirates avait provoqués. Beaucoup de supporters croyaient alors qu’une génération dorée allait imposer sa patte. On peut d’ailleurs se demander si eux aussi, ou au moins certains d’entre ces joueurs, ne se sont pas vus trop beaux après cette histoire ? S’ils ne se sont pas dits que le plus dur était fait… alors que les difficultés commençaient à peine.

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