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Semaine spéciale PSG - OM

Notre avis sur PSG/OM, les meilleurs ennemis

Critique du livre de Jean-François Pérès, Daniel Riolo et David Aiello

vendredi 13 mars 2009, par Vivien B.

Notre avis sur PSG/OM, les meilleurs ennemis

Fin 2003, un journaliste marseillais et un journaliste parisien publient un ouvrage consacré aux deux clubs phares du football français, le Paris SG et Marseille. Si l’on pouvait être sceptique à l’annonce du projet — la médiatisation de ces deux clubs nous ayant habitués à des dérives opportunistes —, PSG/OM, les meilleurs ennemis est une véritable bonne surprise. Claire, précise et très bien documentée [1], l’enquête porte sur la rivalité que se livrent les deux seuls clubs français ayant remporté une coupe d’Europe, en abordant sa genèse, le rôle des différents protagonistes, et en faisant le récit des quinze dernières années. Un livre indispensable.

Préambule : co-écrit par Jean-François Pérès — marseillais, grand reporter au service des sports de RFI, spécialiste de l’OM — et Daniel Riolo — parisien, journaliste à RMC, spécialiste du PSG —, PSG/OM, les meilleurs ennemis fut publié fin 2003 aux éditions Mango Sport. Avec la collaboration de David Aiello — journaliste sur Football 365, spécialiste du PSG —, le livre a ensuite été réédité deux fois, fin 2005 puis début 2007. C’est cette dernière édition que nous avons lue.

Une enquête passionnante

Très complète, l’enquête aborde quasiment tous les sujets majeurs liés à la rivalité entre le Paris SG et l’OM : le « terreau sociologique » sur lequel elle repose (chapitre 1), l’historique respectif des deux clubs et leurs précédentes confrontations (chapitre 2), l’arrivée de Canal+ au PSG en 1991 (chapitre 3), les débuts de la rivalité, initiés par ceux que les auteurs surnomment « les apprentis sorciers » (chapitre 4), le tournant de décembre 1992 (chapitre 5), l’affaire VA-OM et ses conséquences (chapitre 6), l’impact de la rivalité sur l’Équipe de France (chapitre 7), les supporters (chapitre 8), la sécurité (chapitre 9), les médias (chapitre 10) et enfin la place qu’occupent les deux clubs dans le football français aujourd’hui, par rapport à la progression de Lyon notamment (chapitre 11). Alors que le sujet est un véritable marronnier dans la presse, bénéficiant chaque année d’une couverture médiatique considérable quel que soit le média (télévision, radio, presse écrite, Internet), et que la notoriété cumulée des deux clubs aurait pu inciter à un torchon opportuniste, il n’en est donc rien.

La principale force du livre réside, plus encore que dans la variété des thèmes abordés, dans la qualité des témoignages recueillis. Outre les citations d’époque, tous les protagonistes sont invités à commenter quelque quinze ans plus tard la naissance de la rivalité au début des années 1990. Le recul pris par chacun depuis permet par ailleurs une liberté de ton qui n’aurait sans doute pas été la même il y a quelques années encore, lorsque Pierre Lescure présidait encore le groupe Canal+ et sa filiale PSG, par exemple.

La principale thèse du livre est la suivante : «  Il y a quinze ans, cet antagonisme n’existait tout simplement pas. » Si elle s’appuie sur un «  terreau sociologique fertile  », la rivalité sportive entre le PSG et l’OM ne date en fait que de l’arrivée de Canal+ en 1991. Dans un autre livre sur le PSG [2], l’historien Thierry Berthou évoquait « la déjà très longue rivalité entre la cité phocéenne et la capitale du Royaume, de l’Empire puis de la République ». Un historien marseillais, Pierre Échinard, explique ainsi : « Les Marseillais ont ce sentiment diffus que, historiquement, Paris a toujours voulu du mal à leur ville. Mais la plupart du temps, personne n’arrive à se souvenir d’un événement précis. C’est une impression partagée, qui flotte dans l’air. » Le chapitre premier, intitulé « Ils ne sont pas comme nous » — l’explication de Di Meco au fait que les Parisiens ne sont pas les bienvenus à Marseille —, développe ce victimisme marseillais, mis en avant par les Olympiens pour expliquer leur haine de tout ce qui se rapporte à la capitale. Pourtant, l’ethnologue Christian Bromberger souligne qu’auparavant la rivalité avec Paris n’était pas sportive mais uniquement « civilisationnelle ». « C’est plus une rivalité sociale qui s’est transposée sur les pelouses », estime également le journaliste de La Provence Mario Albano. Il faudra donc attendre l’alliance improbable entre Bernard Tapie et Canal+ au début des années 1990, soit plusieurs années après les premiers trophées du PSG — un titre de champion, deux coupes de France —, pour que les matches face au PSG deviennent le lieu où « le Marseillais règle ses comptes », pour reprendre la formule de José Anigo : « S’il a un problème, si ça ne va pas, il vient au stade et crie sa colère. À travers Paris, il vise l’institution. »

Outre la genèse de cette rivalité, remarquablement développée, PSG/OM, les meilleurs ennemis revient en détails sur différents épisodes ayant émaillé la vie des deux clubs dans les années 1990, dont certains qui valurent aux supporters du PSG d’être taxés de paranoïa à l’époque. Parmi les clichés véhiculés par un certain nombre de supporters « aveuglés » par leur passion figure en effet celui-ci : les médias ne nous aiment pas, ils nous critiquent plus que les autres. Mais s’il s’agit d’un cliché la plupart du temps, il arrive que certaines situations admettent bel et bien des explications. Le traitement médiatique du Paris SG sur Canal+ en fait partie. Les plaintes des supporters parisiens, à l’époque balayées d’un revers de manche, n’étaient pas toutes infondées. Extraits.

L’animosité de TF1 envers le PSG de Canal+

La qualité d’actionnaire du PSG de Canal+ a eu des impacts et la proximité de Bernard Tapie avec la filiale du groupe Bouygues ont eu des incidences sur le positionnement de TF1 :

Dès la privatisation de TF1 en 1987, Bernard Tapie […] s’était porté acquéreur de 1,66 % du capital de la chaîne. Peu de temps après, Bouygues, actionnaire majoritaire de TF1, était devenu le sponsor-maillot de l’OM. « Une équipe avec de tels résultats devient vite la préférée des Français, et donc de TF1 », résume Étienne Mougeotte, vice-président de la chaîne. Et sur la Une, le bon produit se mue rapidement en star de l’antenne. C’est ce qui va se passer pour l’OM, ses joueurs et son président. À l’OM, la star est exposée, bichonnée, elle fait ce qu’elle veut, on n’y touche pas. Seul le dieu Audimat peut défaire ce qu’il a créé. Thierry Roland rappelle à ce propos une anecdote ô combien révélatrice :

À la fin de la saison 1990/1991, Jean-Pierre Papin, attaquant vedette de l’OM, est sur le point d’annoncer son départ. La presse écrite livre beaucoup d’informations contradictoires sur ce qui constitue l’affaire sportive de cette fin de saison. Dominique Grimault, du service des sports de TF1, est envoyé sur place pour enquêter. Au micro du journaliste, Papin donne sa version des faits. Mais Bernard Tapie n’apprécie pas du tout l’entretien. Le lendemain, en compagnie de Grimault et de Jean-Claude Dassier — alors directeur des sports —, nous sommes convoqués dans les bureaux de Patrick Le Lay sur les Champs-Élysées. Visiblement très remonté, le PDG de la chaîne choisit de ne s’adresser qu’à moi. Il me fixe droit dans les yeux et me dit : «  Sur TF1, il y a des stars. Patrick Poivre d’Arvor est une star, Anne Sinclair est une star… » Il se met alors à hurler : « Et l’Olympique de Marseille est une star !  » Et là, sans même le regarder, juste en le désignant de l’index, il dit à Grimault : « Toi, t’es viré. » On n’a rien pu faire pour qu’il change d’avis.
Malgré le soutien de Dassier, le journaliste sera effectivement écarté quelques mois plus tard.

[…]

TF1 a toujours clairement soutenu l’OM sous Bernard Tapie, y compris dans les coulisses, aboutissant à ce que l’on a appelé la « guerre des chaînes ». Un conflit forcément ambigu, vu la position intermédiaire de Canal+. Michel Denisot résume d’une formule lapidaire : « Tapie jouait sur les deux tableaux. Il était le meilleur ami des deux, et l’ami exclusif de chacun. […] Dans la mesure où le PSG, c’était Canal, on pouvait nettement deviner une animosité de TF1 contre le PSG. » […] Pascal Praud se justifie : «  TF1 est alors derrière l’OM parce que la France est derrière l’OM. On était avec les joueurs en coupe d’Europe le mercredi, puis à nouveau avec eux le samedi. Forcément, on est devenus proches. La complicité avec les médias, en l’occurrence TF1, et eux est évidente. »

Canal+ finance (aussi) l’OM

Face à l’animosité de TF1 envers le club de son concurrent — et sa complicité avec le club en vogue —, Canal+ n’adopte pas la même stratégie. Charles Biétry se souvient de cette période :

En 1992, après une élimination prématurée face à Prague, je suis allé dans le vestiaire proposer une prolongation de contrat à Bernard Tapie. Il en est resté les bras ballants. […] L’OM, c’était un bon produit. […] On a même conclu des contrats avec l’OM à des moments où plus personne n’en voulait, et on a ainsi sorti le club de plusieurs crises financières importantes. J’ai même le souvenir qu’on payait plus cher les droits de l’OM que ceux du PSG. Preuve que l’on n’était pas, comme le disait alors le public marseillais, pro-PSG.

[…]

C’est à cette occasion [la relégation de l’OM en D2 suite à l’affaire VA-OM] que l’on atteint le paroxysme de l’ambiguïté de Canal+. L’actionnaire principal du PSG va donner un gros coup de pouce financier à l’OM. Un contrat, signé à Marseille, prévoit l’achat des prochains matches européens du club olympien. Pourtant […] jamais l’OM n’a semblé aussi loin des coupes d’Europe. La somme versée est d’environ 25 millions de francs (environ 3,5 millions d’euros). Si l’OM est effectivement rétrogradé, cette somme aidera le club à remonter rapidement, car Canal+ ne peut pas se passer de Marseille dans son produit football. Autour de ce contrat, tout un cérémonial est organisé. Le but est également d’améliorer l’image de la chaîne aux yeux des fidèles de l’OM. Bernard Tapie convoque une réunion tripartite avec Charles Biétry et des supporters et déclare en substance : « Biétry et Canal, ce sont mes amis, des amis de l’OM. Vous pouvez jeter des pierres sur les camions de France 2, mais laissez Canal tranquille. »

Pour Jean-Claude Darmon, « Canal+ est clair dans cette histoire. La chaîne a besoin de l’OM pour le championnat. C’est à la fois économique et stratégique. On peut effectivement donc dire que Canal+ a contribué à ramener l’OM parmi l’élite. »

Canal+ cherche à se démarquer du PSG

Outre ce soutien financier passé plus ou moins inaperçu sur la Canebière — « Canal a beaucoup soutenu financièrement l’OM, et ce sans grande reconnaissance », explique Michel Denisot dans le livre —, Canal+ doit se démarquer clairement du club parisien sur son antenne.

Thierry Gilardi se souvient : « Après ce match [PSG-OM du 18 décembre 1992, émaillé par de nombreux incidents], la fracture est très nette, et elle est très mal ressentie chez nous. Il faut savoir qu’au service des sports de Canal, il y a de tout : des supporters du PSG, de l’OM, mais aussi d’autres clubs. D’un seul coup, on s’est retrouvés catalogués supporters du PSG. » […] Cette neutralité qu’il faut maintenant afficher, voire surexposer, va donner l’occasion à certains de régler leurs comptes. Charles Biétry va ainsi envoyer, dès qu’il en aura l’occasion, ce que Gilardi appelle des « exocets » sur le PSG de son ex-meilleur ami Michel Denisot. Exemple célèbre, évoquant la tristesse du jeu parisien : « Il manque un sourire au PSG. » Le 24 décembre 1992, Pierre Lescure déclare : « Biétry ne rêve que d’un truc, c’est que le PSG ne soit pas champion, ça lui posera moins de problèmes d’images à gérer. »

[…]

Tout ce qui sent Paris, le PSG ou Canal+ devient automatiquement persona non grata à Marseille. Le 29 mai 1993, pour un OM-PSG qui suit de trois jours la victoire à Marseille en coupe d’Europe, la foule est survoltée. L’OM a marché sur l’Europe et doit le faire sur Paris. En tribune présidentielle, Bernard Brochand, Pierre Lescure et Alain Cayzac sont violemment interpellés par la foule. La situation devient tellement préoccupante que Tapie organise l’évacuation des dirigeants parisiens. Les trois hommes « termineront le match » aux vestiaires, expulsés par la foule marseillaise. Tapie manipule cette rivalité à sa guise, tour à tour pompier et pyromane. […] Gilardi confirme :

Aller au Vélodrome est rapidement devenu une chose très difficile. On a fait des entrées allongés dans la voiture. […] On se déplaçait toujours avec une protection. Un jour, Charles Biétry et moi revenions d’Athènes, où l’OM avait joué un match de coupe d’Europe. Au retour à l’aéroport, trois cents supporters marseillais étaient là. Ils ont failli nous tuer. On a essuyé des jets de bouteille, on a reçu des coups violents. Finalement, un confrère marseillais a réussi à s’interpose. Tapie est ensuite arrivé pour éteindre — momentanément — le feu.

[…]

La chaîne va s’employer à démontrer que les liens avec le PSG n’empêchent pas ses journalistes d’être impartiaux. Au risque d’aller trop loin, Charles Biétry prend une initiative qui déconcerte nombre de ses collaborateurs. Le chef du service des sports intervient en effet dans l’émission phare de la chaîne, Nulle part ailleurs, pour prouver que les Marseillais ne sont pas des tricheurs et que Canal+ est, en quelque sorte, la chaîne qui va laver l’honneur de l’OM. […] L’initiative de Biétry est clairement condamnée par Thierry Gilardi alors à Canal+ :

L’affaire de 1997 est ridicule. C’est une idée de Charles, difficile à comprendre et, en tout cas, vraiment critiquée en interne. Le cirque autour de cette affaire est un calcul, pour plaire aux abonnés du sud de la France. Cela s’est avéré un fiasco total. On est passé pour des nuls auprès de tout le monde. Rolland Courbis, Fabrizio Ravanelli en duplex depuis Marseille, quelle honte… Et les 80 mètres de bandes-images décortiquées pour, peut-être, observer que plusieurs dizaines de mètres avant, il y avait, peut-être, eu contact entre Ravanelli et Rabesandratana… Charles a totalement pété un câble à ce moment-là. Philippe Gildas a accepté cette intervention dans son émission, car Charles lui avait vendu ça comme une affaire stratégique. Mais tout était contre nous alors. Charles souffrait de ne pas être reconnu dans le Sud, d’avoir cette étiquette PSG en permanence. Il a voulu trop en faire. […] Un très mauvais calcul. Jamais, dans l’histoire du football, on n’a passé une semaine à refaire un match de la sorte. Cette affaire a laissé des traces chez Charles, car il n’a pas été accueilli à Marseille comme il l’espérait. Ni ailleurs, du reste. Les supporters de Lens, Lyon ou Bordeaux n’ont absolument pas apprécié le battage fait autour de ce simple penalty.
Michel Denisot, alors dirigeant du PSG, préfère ne pas trop s’étendre sur le sujet. Il parle « d’une volonté politique, une fois de plus  », avant de conclure en répétant : « C’est comique. »

[…]

À l’époque, il nous fallait des gardes du corps pour aller à Marseille. […] Il fallait faire attention à tout ce que l’on disait, peser chaque mot. […] En mars 2003, j’ai longuement attendu et réfléchir avant de dire que Ronaldinho était un joueur extraordinaire. En fin de match — et parce qu’il aurait été incroyable, au vu de sa prestation, de ne pas le dire —, j’ai tout de même lâché que c’était un joueur exceptionnel.)] Peser chaque mot, afficher sa neutralité, la tâche s’avère parfois délicate pour les journalistes de Canal+ qui ont parfois eu tendance par le passé à forcer le trait. Gilardi en convient volontiers : «  À force de vouloir démontrer que l’on était pas Parisiens, on en a trop fait.  » […] Canal+, c’est également Les Guignols de l’info […]. Rien ne fut épargné au PSG chez les Guignols […].

Quelques regrets malgré tout

Le Parisien étant ce qu’il est, nous avons tout de même quelques reproches à adresser à PSG/OM, les meilleurs ennemis. Le principal étant a priori dû à la difficulté d’écrire à plusieurs mains : l’une marseillaise, l’une parisienne [3]. Dès l’introduction, les auteurs veillent à ne froisser personne : « Certains d’entre vous ont sans doute déjà classé les auteurs de ces lignes dans la catégorie supporters de l’OM pour avoir écrit « OM-PSG », et non « PSG-OM ». Dans ce domaine, les susceptibilités sont exacerbées… Ainsi nous justifierons-nous, cette fois, par une volonté de respecter l’ordre alphabétique. Par la suite, nous utiliserons indifféremment OM-PSG ou PSG-OM, sans malice ni favoritisme. » Pour autant, certains passages du livre — parfois abordés différemment en plusieurs endroits du livres — nous laissent une impression désagréable, que ce soit par maladresse ou par précipitation.

La question des supporters

On y apprend par exemple que «  à chaque match, même si le phénomène s’est quelque peu (sic) atténué ces dernières années, le Parc des Princes se remplit d’une part non négligeable de supporters de l’équipe adverse, vivant en Île-de-France [4] ». Et pour éclairer ce propos, les auteurs ne trouvent rien de mieux qu’une citation du vice-président du club central des supporters de l’OM… Suit alors le cliché habituel des chaleureux Marseillais, tolérants et ouverts, face aux Parisiens arrogants, hautains et violents/nazis. La caricature dépeinte par Lionel Tonini, le capo des Yankees, est habituelle : « Ce match ne vaut que par son environnement. La ferveur marseillaise contre le hooliganisme parisien. Le peuple marseillais contre le show-biz parisien. » Mais il est regrettable de la voir reprise à leur compte par les auteurs, lorsqu’ils évoquent « l’affrontement entre un Paris hautain, bourgeois, et une Marseille chaleureuse, populaire ».

Tout au long du livre, les supporters parisiens ne seront évoqués que par le prisme du hooliganisme ou du racisme. Si les réponses évitent les amalgames, les questions cantonnent tout de même le débat à un faible niveau. Dans le chapitre consacré aux supporters, les intertitres sont révélateurs : « Ultra à Marseille… » puis « Casual à Boulogne ». En fait, le principal centre d’intérêt des auteurs se borne à la politisation et la violence, ce qui est regrettable vis-à-vis des lecteurs non-initiés. Le Kop de Boulogne, assimilé aux Boulogne Boys [5] — erreur habituelle mais regrettable dans un ouvrage de spécialistes —, ne sera notamment évoqué que par ce biais-là. Pour ce qui est des ultras parisiens, les Boulogne Boys seront tout juste cités, et le Virage Auteuil balayé en une phrase.

Enfin, dernier regret à ce sujet : les supporters parisiens cités ne sont pas les homologues des leaders marseillais (Lionel Tonini, Michel Tonini, Christophe Bourguignon…), mais des supporters lambda, pas nécessairement représentatifs, aussi bien informés et impliqués que ne l’auraient été les leaders parisiens.

Quelques passages partisans

De manière plus caricaturale encore, quelques événements particuliers font l’objet de commentaires partisans déplacés [6]. Pour évoquer le match remporté 2 buts à 3 au stade Vélodrome par l’équipe réserve du PSG [7] en novembre 2004, trois jours après la victoire 2-1 des Parisiens en championnat, c’est un véritable propos de supporter aigri que l’on peut lire : « L’équipe B alignée ce soir-là par Vahid Halilhodzic (excuse toute trouvée en cas de défaite) revient dans le match grâce à un improbable doublet de Boskovic, dont le talent n’avait jusqu’à présent ébloui personne. »

Auparavant, le dernier match de la saison 1998/1999, PSG-Bordeaux, était lui aussi narré d’un point de vue partisan : Rolland Courbis, qui avait déclaré avant la rencontre : « Le match est déjà plié, la régularité de cette fin de championnat est discutable  », « ne sera pas contredit », affirment les auteurs. Feindouno se serait retrouvé « étrangement seul dans la surface parisienne », ce qui est faux, les images le prouvent. « Sur cette rencontre, l’honnêteté des joueurs parisiens prête à caution  », est-il encore écrit. Enfin Courbis est qualifié de « dindon d’une face au goût saumâtre ». Le dénouement malheureux pour l’OM s’explique pourtant une page plus tôt. Un ancien joueur marseillais, qui tient à garder l’anonymat, raconte : « Courbis s’est comporté en idiot. Venir chercher le titre à Paris était pour lui une certitude. Il nous avait dit de ne pas inviter nos femmes, on devait rester dans la capitale pour faire la fête entre nous. Résultat, il s’est enflammé, on a perdu et on s’est retrouvés au VIP comme des cons. » Le PSG a privé Marseille du titre ? Oui, en s’imposant 2-1 contre l’OM au Parc des Princes le 4 mai 1999, lors de l’antépénultième journée de la saison.

Le récit du match OM-PSG de février 2000, marqué par les agressions sur Laurent Leroy de Jérôme Leroy et Sébastien Pérez notamment, sera du même acabit.

Une notoriété internationale, vraiment ?

« OM-PSG a atteint un niveau de notoriété internationale comparable à celui des duels européens historiques, les Barça-Real, Manchester-Liverpool ou Juventus-Inter », annoncent les auteurs dès la première page de l’introduction. Sans exagérer la portée et la représentativité de nos observations, rappelons les synthèses que nous avons réalisées ces derniers mois après avoir interrogé des supporters étrangers à l’occasion de la coupe UEFA :
- en Allemagne : « la plupart des supporters de Schalke 04 que nous avons interrogés ne savent pas grand-chose sur la rivalité entre Paris et Marseille » ;
- en Angleterre : « seule une minorité des supporters de Manchester City qui nous ont répondu connaissent l’existence même d’une rivalité Paris / Marseille » ;
- en Espagne : « dans les médias espagnols, le football français n’est pas cité, et passe même derrière la MLS ou les matches brésiliens et argentins ».

Erreurs et approximations

L’historique du PSG recèle quelques surprises. Ainsi, outre la considération habituelle pour le Stade Saint-Germain, on notera cette correction étonnante : après une citation de Pierre Bellemare appelant à l’aide pour « ressusciter » le football à Paris en 1970, les auteurs précisent que « plutôt que de “ressusciter” le football à Paris, il s’agirait quasiment de l’enfanter : si l’on excepte un titre de champion de France [du Racing] en 1936, le palmarès des clubs parisiens depuis l’instauration du professionnalisme en 1932 est vierge ! » Pourtant, si l’agonie du football parisien dans l’élite française après le passage au professionnalisme est indiscutable, il s’agit bel et bien d’une mort : comme le dit implicitement Bellemare, le football à Paris a existé avant 1970 [8]. La précision apportée par les auteurs est donc superflue, mais surtout inexacte.

Enfin quelques coquilles se sont glissées dans le livre. S’il n’y a rien de grave à cela, il est toutefois dommageable que la troisième édition d’un ouvrage comporte de telles erreurs — fautes d’orthographe, mots oubliés —, quand bien même il s’agirait d’un livre sur le football… Entre autres exemples, citons le pauvre Jean-Philippe d’Hallivillée — directeur de la communication, de la sécurité puis des relations avec les supporters du PSG —, qui sera nommé alternativement Dhallivillée (page 101), d’Hallivillé (page 106) ou encore D’Halivilée (page 247).

En synthèse

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PSG/OM, les meilleurs ennemis

On a aimé :
- l’angle du sujet traité ;
- la qualité des témoignages ;
- la richesse des thèmes abordés.

On a pas aimé :
- un découpage parfois déconcertant ;
- certains passages partisans ;
- le manque de relecture.

Notre avis : indispensable !

Notes

[1] La présence de PSGMAG.NET dans la bibliographie n’est pour rien dans ce jugement. Tout juste est-ce une preuve nous ne sommes pas si critiques avec Daniel Riolo qu’il veut bien le croire…

[2] Histoire du Paris Saint-Germain FC (1904-1998), aux éditions Pages de Foot.

[3] Dans sa première édition, le livre était co-écrit par Jean-François Pérès et Daniel Riolo.

[4] Si ce phénomène était vrai jusque dans les années 1980, le Parc étant parfois quasi-intégralement acquis à la cause de l’adversaire, ce n’est plus le cas depuis fort longtemps pour l’essentiel des matches du PSG. Seules certaines rencontres, qui suscitent un engouement énorme pour des Franciliens d’origine étrangère (portugaise, turque, etc.), voient les tribunes latérales du Parc des Princes se remplir de sympathisants de l’équipe adverse.

[5] Si l’association des Boulogne Boys — qui regroupait une partie seulement des locataires de la tribune Boulogne — a été fondée en 1985, les débuts du KOB remontent en revanche à 1978.

[6] À l’instar des auteurs, prenons les devants : il ne s’agit évidemment pas de qualifier le livre de « pro-OM » ou « anti-PSG ». D’aucuns pourraient peut-être faire le reproche inverse au livre, à propos de certains événements dont le récit serait jugé « pro-PSG » — nous n’avons pas d’exemple précis, mais concédons que notre attention a pu être moins vigilante sur ce point…

[7] Parmi les titulaires habituels, seuls Pichot, Mendy et Pierre-Fanfan étaient alignés ce soir-là. Alonzo, Ateba, Badiane, Boskovic, Cissé, Helder, Benachour et Ljuboja complétaient le onze de départ. Ogbeche et Ibisevic sont rentrés en jeu ; Teixeira, Bamba et Letizi sont restés sur le banc.

[8] On lira avec intérêt les pages de Wikipédia à ce sujet. Extraits : « Inventé par les Britanniques, le football codifié à Londres en 1863 est d’abord pratiqué en France au nord d’une ligne Caen - Paris - Laon, principalement en milieu scolaire. […] La toute fin des années 1880 et le début des années 1890 voient l’émergence des premiers clubs à Paris. Les Britanniques sont à l’origine des deux plus prestigieux : le Standard AC et les White-Rovers. […] En 1893, ces clubs parisiens menacent de se constituer en Ligue si l’USFSA s’entête à ne pas admettre le football. Le Standard et les White-Rovers sont déterminants dans cette reconnaissance. […] Le premier championnat […] a lieu en avril-mai 1894 et met aux prises cinq clubs parisiens. […] La première « Division 1 » de l’histoire du football français comprend neuf clubs parisiens. […] Meilleure illustration de la multiplication des clubs, trois divisions sont mises en place à Paris dès 1897 ! […] Il faut […] attendre les premières années du XXe siècle pour voir le football partir à l’assaut de l’Hexagone. Les clubs fleurissent alors aux quatre coins du pays et des sections football sont créées dans des clubs sportifs existants. Les ligues régionales de l’USFSA se constituent et le football devient un phénomène national. […] On passe ainsi de 4 régions désignant un champion (Paris depuis 1894, Nord depuis 1898 et Normandie et Basse-Normandie depuis 1900) en 1902 à 13 dès 1904. […] Point culminant de l’omnipotence de l’USFSA, 1904 marque la fondation à Paris de la Fifa malgré le refus britannique. […] Ces championnats pros de l’époque héroïque connurent toutefois un remarquable succès populaire à Paris et bénéficiaient d’une couverture importante dans la presse. L’étude de ces compétitions aujourd’hui totalement tombées dans l’oubli reste à faire. […] Cette explosion du football français est très profitable à sa diffusion. Dès la saison 1905/1906, le football compte plus de 300 équipes pour quelque 3 850 joueurs alors que le rugby ne recense que 141 équipes et 2 115 joueurs. […] Sur la scène européenne, les clubs français sont considérés comme sérieux. La réputation de clubs comme le Red Star ou le Racing Club de Paris franchit largement les frontières. […] L’entre-deux-guerres marque la fin de la prédominance parisienne sur le football national. […] En 1932, quatre clubs de la capitale seulement franchissent le pas du professionnalisme. Le Racing répudie le désormais RC Paris tandis que le Stade français se refuse obstinément à admettre cette révolution… […] »

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