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Série de cinq portraits inédits de l’ancien président du PSG

[PSG-Nantes] Qui était Francis Borelli ? (2/5)

Témoignages et archives pour faire connaissance avec Francis Borelli

jeudi 11 septembre 2008, par Vivien B.

[PSG-Nantes] Qui était Francis Borelli ? (2/5)

Ce dimanche 14 septembre 2008, à l’occasion du match Paris SG - FC Nantes (5e journée de Ligue 1), la tribune présidentielle du Parc des Princes sera officiellement rebaptisée « Tribune présidentielle Francis Borelli », en hommage à l’ancien président du PSG, décédé en octobre dernier. Cet honneur fait à « l’homme à la sacoche » illustre l’importance de son oeuvre pour le football à Paris. À cette occasion, nous vous proposons de revenir sur Francis Borelli, les aspects les moins connus de son parcours et sa personnalité, grâce notamment à la participation de sa famille.
Deuxième partie : ses qualités humaines, son goût pour la poésie et les jolies lettres, sa superstition… (découvrez les 5 parties, publiées d’ici dimanche)

Les anecdotes de celles et ceux qui ont croisé la route de Francis Borelli sont nombreuses, et souvent savoureuses. Elles nous permettent d’en savoir plus sur la personnalité de Francis Borelli — bien aidés une nouvelle fois par sa fille, Lucie.

De grandes qualités humaines

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Francis Borelli

Que ce soit les personnes qui ont travaillé avec Francis Borelli au Paris SG ou les supporters qui l’ont approché, tous louent les qualités humaines de Francis Borelli, à commencer par sa gentillesse, son amour des gens et sa disponibilité. Parmi les nombreuses choses qui ont été dites et écrites sur Francis Borelli, les commentaires les plus fréquents évoquent un homme généreux, très drôle, bon vivant et enthousiaste. Cela correspond-t-il à la réalité ? Sa fille Lucie nous répond :

Oui, on a été très étonnés de voir à quel point l’essentiel avait été perçu. On n’a rien trouvé où l’on s’est dit « on ne le voyait pas comme ça, c’est marrant que les gens le perçoivent de cette façon ». Et en effet c’était quelqu’un de très drôle, c’était un livre de blagues, il connaissait un nombre de blagues absolument hallucinant, il avait une façon de raconter qui faisait qu’on était écroulés de rire. Il était très bon vivant dans le sens où il adorait la vie, il profitait de chaque instant — rien à voir avec l’alcool et la nourriture. Ses plaisirs étaient des plaisirs qu’il vivait vraiment à fond, il croquait la vie à pleines dents. Et c’est vrai qu’il était aussi très généreux.

Un homme de principes

Lucie Borelli précise les qualités humaines de son père :

Je crois très sincèrement que ce dont il était le plus fier, jusqu’à ce qu’il soit malade, ça a été d’avoir sa conscience pour lui, d’avoir bien fait les choses. Il prenait extrêmement soin de ses joueurs, de sa famille — pas seulement sa femme et ses enfants : ses oncles, ses tantes, les cousins, les cousines, les amis… un inconnu dans la rue qui lui demandait de l’aide, papa allait l’aider — et je crois que sa plus grande fierté c’était comme on pourrait dire vulgairement de se regarder le matin dans la glace, en se disant « je me conduis bien ».

Je crois que, si papa était arrivé à un âge où on peut faire en toute conscience un bilan de sa vie, il aurait pu certainement se dire « je me suis bien conduit, j’ai bien fait les choses ». Et je crois qu’avant tout le reste, c’est ça le plus important. C’était vraiment un homme de principes, qui avait des valeurs, et a priori, je me trompe peut-être, mais j’aurais tendance à dire que sa plus grande fierté c’était de ne pas transiger sur ses principes, de ne pas sortir de la ligne droite. D’être resté loyal avec ses valeurs, avec les hauts et les bas qu’on a tous… C’était quelqu’un sur qui on pouvait compter, et on le savait. Et ça c’était quelque chose dont il était fier — mais pas au sens qu’il se sentait supérieur ou imbu de sa personne, pas du tout.

Mes grands-parents étaient des gens simples, assez pratiquants — très pratiquant pour ma grand-mère —, qui avaient des vraies valeurs, des vrais principes d’éducation, de moralité, et papa était très attaché à ça : on ne ment pas, on ne triche pas, on ne vole pas, on n’ignore pas le mal-être de l’autre, on est généreux — pas financièrement, mais on donne de sa personne. C’étaient des choses auxquelles il était attaché. Jusqu’à ce qu’il soit malade malheureusement, parce qu’après la maladie, et surtout la sienne, fait qu’on n’est plus tout à fait maitre de ses actes, de ses propos. Je pense que ce serait la chose dont il serait le plus fier, même avant sa famille, ses enfants… C’était d’avoir une rigueur, une ligne de vie et de s’y tenir. Très sincèrement, il a essayé de se conduire jusqu’au bout comme un mec droit. Et je pense qu’il a assez bien réussi…

D’origine modeste, il n’a pas oublié d’où il vient

Dans le livre qu’il a publié en 1986 (Le ballon rouge), Luis Fernandez ne disait pas autre chose :

Avec Pierre Alonzo, un autre des dirigeants du Paris SG a une place à part dans mon coeur. C’est Francis Borelli. Lui président, moi simple élève du centre de formation, puis stagiaire professionnel : il y avait, au départ, peu de chances pour que nous nous rencontrions, que nous devenions réellement amis. Et nous ne sommes pas amis au sens strict du terme. […] Nos relations n’ont jamais été intimes. Elles sont demeurées, pendant les huit années que je suis resté au sein du Paris SG, des relations de président à joueur. Mais, par rapport aux autres, elles ont toujours comporté un côté affectif plus marqué. Francis Borelli a affirmé que j’étais son « fils ». La presse l’a souvent rapporté. Moi, j’ai pour lui une immense admiration et un profond respect pour ce qu’il est, ce qu’il a fait.

Dès nos premières rencontres, j’ai su que nous évoluions sur la même longueur d’ondes. Francis Borelli sait se montrer sympathique d’entrée. Il a ce qu’on appelle un bon contact. Quoi qu’on ait pu en dire, c’est un homme discret. On a vu et revu son image lorsqu’à l’issue de la finale de la coupe de France que nous venions de remporter devant Saint-Étienne, il alla embrasser la pelouse du Parc des Princes. Je ne crois pas que c’était du cinéma. Borelli est un homme du Sud, à la fois entier, démonstratif et réservé.

Au-delà des apparences, je crois pourtant que ce qui nous a instinctivement rapprochés, Francis Borelli et moi, c’est notre passé. Je ne sais pas parfaitement définir la trajectoire qui l’a mené jusqu’à la présidence du Paris SG et à la responsabilité de ses affaires professionnelles. Mais je suis certain qu’il a connu la rue, les difficultés de la vie, l’inégalité devant l’argent, les injustices. Aujourd’hui, il est arrivé au sommet. Il n’a pourtant pas oublié. J’ai rarement eu l’occasion de rencontrer un personnage qui, comme lui, possède un tel respect d’autrui. Borelli est un homme bon, spontané. Il ne condamne jamais sur un premier jugement. Il ne rejette pas. Je suis persuadé qu’il respecte un clochard lorsqu’il le croise dans la rue. J’étais donc son « fils ». Sans doute se reconnaissait-il en moi. Et moi, ce que je souhaite, c’est lui ressembler dans une vingtaine d’années…

Droiture, gentillesse et disponibilité pour tous

La droiture et la gentillesse dont faisait preuve Francis Borelli furent également fréquemment mis en avant par les supporters qui se sont exprimés sur Internet suite à son décès :

- « En 1985/1986, lorsque Bastia crevait misère et qu’il était même question de ne pas nous laisser terminer le championnat de D1, le président Borelli avait refusé non seulement de réclamer la quote-part des recettes due au PSG, mais il l’avait même doublée au retour à Paris ! Inutile de dire que ça a été le seul à agir ainsi à l’époque… Sans compter les messages de sympathie, d’encouragements divers et de soutien qu’il envoya pendant des années au Sporting, comme en témoignent les archives du club. Bref, un président comme on n’en verra plus, et un homme bon qui mérite vraiment un bel hommage. » [par Gedeon, sur mouvement-ultra]

- « À la fin des années 1980, j’avais écrit au PSG pour me procurer les cassettes VHS des finales de coupes 1982 et 1983. Un mois plus tard, les deux cassettes vidéo me parvenaient chez moi avec un mot sympa du président Borelli ! Inimaginable aujourd’hui. La classe. » [par derek jeter]

- « Je me rappellerai toujours que, lorsque l’AS Cannes est remonté en D1 en 1993, il m’avait proposé de monter avec d’autres supporters sur les camions affrétés pour faire défiler les joueurs jusqu’au Kiosque des Allées... » [par philbadboys]

- « C’était quelqu’un d’accessible, d’adorable. Je me souviens d’une discussion entre ma famille et lui apres le Téléfoot à Ranguin. »

Une attention « stupéfiante »

Parmi les qualités qui lui étaient reconnues, l’exceptionnelle attention qu’il portait à ses équipes fut également soulignée avec insistance. Un proche de Luis Fernandez nous a confié qu’il parlait beaucoup avec les femmes des joueurs lors des transferts, afin de les convaincre de signer à Paris. Les corbeilles de fruits, les fleurs et le champagne en guise d’introduction aux plaisirs de la vie parisienne faisaient partie de l’argumentaire… Francis Borelli était également réputé pour ne jamais oublier les anniversaire des femmes des joueurs, à qui il faisait livrer des fleurs. Fernand Taton, directeur administratif du PSG sous la présidence de Francis Borelli, rappelait que celui-ci «  vouvoyait presque tous les joueurs, sauf des garçons comme Luis, qu’il avait connu petit. Il disait Monsieur Susic par exemple… Il avait un respect profond pour eux. » Dernier témoignage sur ce sujet : celui de Mario Mongelli (1 match en D1, en 1978/1979), interrogé par PSG70.com : « Je n’ai pas connu Borelli très longtemps, seulement l’espace d’une saison en tant que stagiaire pro avec l’équipe réserve. Deux ans après mon départ du PSG, je l’ai croisé à la gare de Lyon au retour d’un match avec le Paris FC. Je lui ai dit bonjour, et il m’a répondu “bonjour monsieur Mongelli”. Il ne m’a aperçu qu’une saison mais il se souvenait de mon nom. C’est quelque chose qui m’a marqué. »

Dans son deuxième livre d’entretiens, Le Parc de mes passions (publié en 1995), Luis Fernandez évoquait à nouveau son « père spitituel » :

Borelli est un personnage qui m’aura marqué, un homme pour lequel j’ai à la fois du respect, de l’estime et de l’amour. […] Borelli, avec ses excès, ses coups de folie, est fantastique, il ne laisse pas les gens insensibles. Il a l’art de savoir se faire aimer et respecter. […] C’est un homme de coeur. Il n’oublie jamais rien, c’est important, ni ton anniversaire, ni ta date de mariage, ni la fête de ta femme. Il est, à ce titre, stupéfiant.

Généreux avec les stars, mais aussi les amateurs, les jeunes…

Interrogés par le Parisien en octobre dernier, plusieurs membres du staff parisien de l’époque confirmaient ces attentions :

Francis Borelli laissera aussi l’image d’un homme d’une générosité exceptionnelle. Il n’oubliait jamais un anniversaire ou une naissance. «  Francis avait le coeur sur la main », raconte Pierre Noguès, le président de la section amateur. Il faisait envoyer des fleurs et autres présents aux épouses des joueurs. Il a offert une fourrure en plein été… Mieux encore, il a réglé entièrement le mariage de l’un de ses joueurs. «  Il était comme ça avec les footballeurs mais aussi avec ceux qu’il surnommait ceux qui ne sont pas rentables, en parlant des administratifs, raconte Fernand Taton, ancien colonel recruté par Borelli comme directeur administratif en 1981. Il était généreux avec les pros mais aussi avec les amateurs, à qui il accordait une place importante. Il ne savait pas dire non. » Une générosité manifestée aussi auprès des supporters. Comme lorsqu’il a offert le champagne devant le Pavillon Gabriel le soir du premier succès en Coupe à quelques fidèles restés tard.

D’autres anecdotes confirment la disponibilité de Borelli pour les jeunes joueurs et son intérêt pour le football en général :

- « J’ai eu l’occasion de le rencontrer durant un tournoi de jeunes à Cannes en 1993. C’était un Monsieur très attentionné pour nous, qui était venu nous voir dans nos dortoirs pour savoir ce qu’on avait fait durant la journée, et avec qui on parlait de tout et de rien. Il faisait ça avec toutes les équipes du tournoi, ça m’avait marqué. » [par Donegal]

- « Je l’ai croisé en avril 2000, lors de Red Star - Gueugnon, dans les « coulisses » de Marville… Il semblait être un habitué des lieux ! »

Rarement colérique, et tellement charismatique

Réputé pour avoir une grande force de persuation, Francis Borelli fonctionnait à la séduction, plus qu’aux rapports de force. L’un des rares commentaires évoquant les coups de gueule du président Borelli est formulé par Thierry Morin, joueur dans les années 1970 et 1980, dans Capitale Foot (septembre 2000) : « Borelli aimait avoir une grande famille autour de lui : il était un peu le chef et piquait de grosses colères quand ça allait mal. Mais c’était quelqu’un d’extrêmement charismatique, et de sincèrement et profondément gentil, donc même s’il avait un coup de gueule, il avait une façon de revenir avec juste le coeur grand ouvert qui fait que son coup de gueule, on en tirait toutes les conclusions qu’il y avait à en tirer, il avait tord, il avait raison ; il le disait, et ça passait. »

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Francis Borelli

Superstitieux comme un footballeur

Comment évoquer Francis Borelli sans parler de sa superstition ? Tout le monde se rappelle de sa sacoche en cuir, qui cachait un gri-gri et dont il ne se séparait jamais, que ce soit sur les photos officielles de l’effectif ou pour courir après ses joueurs, le soir d’un sacre en coupe de France.

De la sacoche à la prière, une superstition de chaque instant

Sa fille Lucie confirme d’emblée que ce n’était pas qu’une simple tradition de footballeur :

Ah oui, il était également superstitieux dans la vie en général : pas de chat noir, on ne se passe pas le sel de la main à la main, on ne passe pas sous une échelle… Papa était très superstitieux. Treize à table, c’était même pas envisageable !

La sacoche ? Superstition oblige, on n’a jamais su ce qu’il y avait à l’intérieur. Personne ne savait, maman non plus d’ailleurs, ça fait partie de la superstition.

Dans un article de presse datant de septembre 1985, et dont nous peinons à retrouver le nom, la superstition de Francis Borelli était à l’honneur :

« Pour l’instant, tout va bien. Je ne prie pas, je ne pactise pas avec le ciel. Supposez un peu qu’il croie que je lui en demande trop et qu’il se fâche » Francis Borelli, cravate de soie rayée et veste croisée, est un vieux lion superstitieux tapi dans le cuir velouté d’un immense sofa. Le président du Paris Saint-Germain ose à peine prononcer le nom de son club. Comme si le moindre de son accent pied-noir allait attirer les foudres divines, la discorde, la poisse ou le choléra réunis sur l’équipe vedette de première division. […]

Avant chaque match, le président Borelli a les mains glacées et la gorge sèche. Alors il multiplie les signes de croix, soupire, puis marmonne deux ou trois paroles incompréhensibles pour conjurer le mauvais sort. Le même état de stress et d’excitation qui envahissait le Borelli footballeur benjamin au Patriote de Sousse, en Tunisie, entrant pour la première fois sur un vrai terrain à l’âge de huit ans. « Comprenez-moi, implore, dramatique, le président, je tente cette année un formidable pari. Certains attendent que je me casse la gueule. J’aurai pourtant tout fait pour donner à Paris un très grand club. (NDLR : cette saison-là, et pour la première fois depuis cinquante ans, un club parisien — le Paris SG — finira champion de France) »

Les mêmes chemises… et les mêmes couleurs de voiture !

Naturellement, les souvenirs des personnes qui l’ont connu au stade sont nombreuses à ce sujet :

- Jean-Michel Moutier (ancien joueur du PSG) : « Il portait toujours les mêmes chemises, les mêmes cravates. Il gardait aussi toujours avec lui la même sacoche marron dans lequel il avait certainement ses grigris mais qu’il ne nous a jamais montrés. »

- Pierre Ménès (ancien journaliste à L’Équipe) : « À l’époque où il était président de l’AS Cannes, une année où le club jouait les barrages pour la montée en D1 : il arrive avec une heure de retard au match, je le croise et je lui dis : “Mais vous étiez où ?” Il me répond : “J’ai pas trouvé de voiture rouge…” En fait, il avait pris une voiture rouge pour aller au stade le match d’avant, et Cannes avait gagné. Alors ce soir-là, il voulait absolument venir avec une voiture rouge… »

Un homme de lettres, passionné de poésie

Quiconque a déjà lu ou entendu Francis Borelli sait l’attention qu’il portait à la langue française.

Grand lecteur de poésie

Lucie Borelli, sa fille, précise la qualité d’homme de lettres de son père :

C’était très touchant : papa était passionné de beaux mots, de jolies lettres. Il avait plusieurs petits carnets sur lesquels il notait régulièrement des citations qui le touchaient, qui lui parlaient, qu’il trouvait belles, éloquentes. Et il était en effet très attaché au verbe. Peut-être qu’on l’imagine mal en train de noter des phrases d’auteurs, parce qu’il était très exubérant, assez volubile. C’est vrai qu’il n’était pas du genre à se poser sous un arbre, mais il était passionné de poésie, il en lisait beaucoup.

À nouveau : étant quelqu’un d’enthousiaste, c’était généralement avec son coeur qu’il parlait. Ce n’était pas quelqu’un qui allait travailler ses phrases avec un esprit « marketing » derrière, c’était vraiment le coeur qui parlait. Il avait une jolie plume donc ca rendait bien. Mais c’était le coeur qui parlait. On sent à travers ses lectures que c’est vraiment un coeur qui s’ouvre à ces moments-là. Ce n’était pas pour tenter de « manipuler » l’opinion, vraiment pas. C’était pas le genre du bonhomme non plus…

Passionné de beaux mots, jusque dans les programmes de match

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{N’en déplaise à Baudelaire}

À cet égard, la lecture des programmes de match — un temps que les moins de vingt ans ne risquent pas de connaître — est passionnante. Lors de chaque match, un éditorial s’adressait aux supporters prenant place dans les gradins du Parc des Princes. La plupart du temps, notamment après le décès de René Letellier (le président des Amis du Paris SG), ceux-ci étaient signés Francis Borelli. Les citations y étaient régulières, de Baudelaire (février 1990, PSG-Brest) à Pierre Drieu La Rochelle (« Dans le sport, l’homme reprend ses droits. Il reconquiert la discipline, la seule liberté qui soit douce. », octobre 1988, Paris SG - Strasbourg), en passant par Simone de Beauvoir ou Vauvenargues :

- Septembre 1984, Paris SG - Heart of Midlothian, alors que le PSG est dernier du classement en D1 : « Rien ne pourra me résigner au découragement. “Le désespoir est la plus grande des erreurs”, a écrit Vauvenargues, et un autre écrivain dont le nom m’échappe a dit : “On n’est jamais désespéré lorsqu’on est responsable.” Je peux vous assurer que je ferai tout pour redresser la barre. » Le Paris SG écrasera Bastia 7-1 quelques jours plus tard, et remontera jusqu’à la quatrième place, pour se classer finalement treizième.

- Novembre 1986, Paris SG - Monaco, quelques mois après le premier titre de champion du club : « Rien n’est si dangereux qu’un premier succès. Tout bonheur est un piège que nous tend le destin. » (Delphine de Girardin)

- Septembre 1988, Paris SG - Saint-Étienne : « Gérard Bauër disait “Nos joies les plus profondes ne tiennent pas à des bonheurs établis, mais à nos bonheurs retrouvés”. J’ajouterais même que ce sont celles qui donnent le moins lieu à l’exubérance pour mieux se muer en sentiment de plénitude et de sérénité. […] Simone de Beauvoir écrivait “Entre deux individus, l’harmonie n’est jamais donnée, elle doit indéfiniment se conquérir.” Imaginez la dimension du problème de recherche d’harmonie pour un groupe de 20 footballeurs ! »

À quand le livre de sa vie ?

Au lendemain du décès de Francis Borelli, le Parisien lui prêtait les propos suivants : « ma vie est tellement stupéfiante qu’elle mérite un roman ! » De son côté, Pierre Ménès raconte : « Une année, il me propose d’écrire ses mémoires. Renseignement pris, il l’avait proposé à tous les journalistes de France ! » Enfin, dans le livre PSG, OM, meilleurs ennemis, Charles Biétry explique : « Lui couper la tête m’a toujours embêté. C’est un très mauvais souvenir que j’essaie d’expier en écrivant pour lui son livre de souvenirs. »

Pourtant, le parcours du gamin de Sousse arrivé en France avec 170 F en poche n’a toujours pas fait l’objet d’un récit. Sa fille saisit la perche tendue :

C’est vrai que sa vie mériterait un roman. On lance très officiellement une proposition, à qui sera tenté, parce que ça vaut le détour. Très sincèrement. Ce petit bonhomme qui est né au fin fond de l’Algérie, qui a vécu en Tunisie, dont la première balle de foot était des noyaux d’abricot ou une balle de papier journal qu’il poussait les pieds dans le sable… pour en arriver le 14 septembre 2008 à ce que la tribune présidentielle du Parc des Princes, à Paris, porte son nom… Ca vaut un roman, oui !

Impossible n’est pas Francis Borelli

Laissons la conclusion à sa fille Lucie :

Il était une fois un petit rouquin qui promenait son ennui sur une plage, que surplombait un phare, là-bas, au pays des pieds-noirs.

Les distractions n’étant pas légion et les moyens de sa famille plutôt limités, il passait le plus clair de son temps soit pendu à un arbre — en espérant grandir — soit à jouer au foot avec une boule de papier journal. L’imagination à l’époque ayant encore sa place dans la tête des enfants, il se prenait à rêver qu’un jour il serait sur un grand stade de foot et que tout le monde connaitrait son nom.

Les années ont passé, tantôt difficiles, tantôt studieuses, tantôt militaires, tantôt yéyé, pour finir laborieuses à Paris. De petits boulots en belles situations, d’entrainements avec des « chemises roses », en matches avec des pros, le rêve a commencé à prendre forme.

Il n’est pas resté roux longtemps, ni petit d’ailleurs. C’était un grand monsieur aux cheveux blancs.

Parce qu’il faut toujours croire à ses rêves, dans quelques jours, son nom sera gravé sur un des plus célèbres stades de foot, à Paris.

Comme il serait fier mon papa…


P.-S.

Nos remerciements les plus sincères s’adressent à toutes celles et ceux qui ont contribué à la réalisation de ce portrait :
- en premier lieu, Lucie et Michel Borelli pour leur disponibilité et leur gentillesse ;
- Olivier (ORRG), pour nous avoir ouvert spontanément ses riches archives personnelles (et le cabas qui allait avec) ;
- ainsi que tous les supporters parisiens que nous avons sollicités, dont le point commun fut l’accord immédiat et enthousiaste pour évoquer le souvenir de « président Borelli ».

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2 commentaires ont déjà été postés par nos lecteurs

  • #1

    commentateur anonyme
    12 septembre 2008 11:48

    Merci !

    Quel travail… Ces articles sont superbes, bravo à vous !

  • #2

    commentateur anonyme
    22 août 2012 01:53

    Merci pour ces articles vraiment géniaux !

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